C'est l'histoire d'un coup de chance. Oui, je sais, j'ai pas mal de chance dans ma vie. Et ça continue ici. Un verre dans un bar avec le gardien de mon hôtel. Internet ne fonctionnait pas, et je n'avais que ça à faire. On se retrouve donc dans le troquet, en compagnie de deux Anglaises et de deux Belges. On discute de tout et de rien. Le garde parle peu. Mais à la fin, il nous raconte son histoire. C'est un Maasai. Un Maasai éduqué. Ils ne sont pas très nombreux. Il nous fascine un peu avec sa famille. Au point où on se dit que ça serait cool d'aller dans son village. Deux heures plus tard, c'était organisé. Direction un village Maasai !
D'entrée on se fait accueillir par un troupeau. Les Maasai sont un peuple d'éleveurs semi-nomades.
Après l'accueil animal, l'accueil des Maasai. Un chant, et toutes les femmes et les enfants en habits traditionnels. Des frissons. On ne réalise pas vraiment ce que l'on est en train de vivre. La steppe nous entoure, on est au milieu de nulle part. Et ils sont là, devant nous. Ces nomades dont je ne connaissais pas l'existence il y a quelques années. Ces gens que j'ai découverts sur Internet, puis dans ma télévision. Et ils sont là, plus besoin de petit écran. On peut les toucher, on peut leur parler. On peut danser avec eux.
Leur village est très épuré. Leur maison encore plus. Un toit de paille, des maisons en torchis ou boue séchée (et même de la bouse de vache). Pas de toilettes, pas de salle de bain. Une mini-cuisine, un endroit où dormir. Le feu au milieu de la pièce. C'est tout. On réalise à quel point nous sommes matérialistes chez nous. Un panneau solaire semble surgir tout droit du futur. Il sert à recharger les téléphones. C'est la seule marque de modernité que j'ai pu retrouver ici.
C'est forcément difficile de communiquer. Notre garde nous traduit régulièrement, mais il ne peut pas être partout à la fois. Les Maasai parlent Maa. Ils sont environ 300 000 en Tanzanie, 800 000 au Kenya. Ils font pâturer leurs troupeaux des deux côtés de la frontière. C'est un peuple de nomades donc, mais c'était aussi un peuple de guerriers ! Les hommes peuvent avoir plusieurs femmes, et les femmes... un seul homme (surprise !).
J'apprends qu'ils sont fans de bijoux. Les femmes, et les hommes ! Ils portent notamment de lourdes boucles d'oreilles qui ont formé, au fur et à mesure des années, des trous immenses. Je fascine d'ailleurs les enfants avec mon collier religieux. Ils vérifient tous qu'il fait du bruit. Et ça les fait rire ! (il en faut peu parfois) Je me retrouve quelques minutes plus tard avec un collier de perles, le souvenir typique d'une journée avec eux.
On pensait être au bout de nos surprises lorsque le Kilimandjaro est apparu... là, je pense qu'on avait atteint le paradis terrestre. Je résume : la steppe, le village Maasai, et le Kilimandjaro derrière. What else ?
La santé. Oui, c'est important. Aujourd'hui je suis un peu au fond du trou. Du coup, j'ai lâché mes camarades de visite pour aller faire la sieste. Je n'ai pas participé à la séance de tatouage (des brûlures ! Un peu fous ces Maasai !) ou à la séance en habit traditionnel. Mais je m'en fous. J'ai eu une sacré belle journée. Et j'ai partagé ces moments avec Anaïs, qui vient de me rejoindre ici (après 24 heures de retard d'avion et un bus en panne !). Deux Audomarois au pays des Maasai. Classe.
Le soir, nous nous retrouvons dans l'auberge, pas encore vraiment remis de cette journée. Et là s'engage une discussion assez surréaliste. On explique à notre garde Maasai que les homosexuels ont le droit de se marier dans des pays européens. Inconcevable pour lui. C'est d'ailleurs la première fois qu'il entend parler des homosexuels ! Il ne savait pas que ça existe, il n'en a jamais vu. Il nous demande comment deux filles peuvent avoir une relation sexuelle. Gros blanc, suivi d'un gros fou rire. Vous auriez dû voir sa tête lorsque les Anglaises lui ont parlé des mariages religieux pour les homosexuels en Angleterre.
Une différence dans la culture. Une différence énorme. Pour lui, c'est normal de tuer un homme si celui-ci couche avec sa femme. Il est d'ailleurs persuadé qu'un homosexuel Maasai serait tué. Pour nous, la polygamie n'est pas vraiment normale. Pour lui, si le Maasai a suffisamment de vaches, c'est tout à fait logique.
On a pu voir à cette occasion à quel point les Maasai sont restés en dehors de la mondialisation. Jusqu'à il y a peu, ils refusaient tout mariage avec les autres ethnies. Tes parents choisissaient ta femme ou ton mari. Tu pouvais être marié à 12 ans. Tu n'allais pas à l'école. Progressivement, les choses changent. Au contact de la société, les Maasai évoluent. On aura été une petite pierre de l'édifice.