25 décembre 2014 4 25 /12 /décembre /2014 23:06

D'ordinaire, je suis un peu le rabat-joie de service à Noël. C'est une fête que je n'aimais pas, pire, que je ne supportais pas. C'est un surplus de bouffe et de consommation légendaire, pour une raison pseudo-religieuse. Mais bon, comme j'ai commencé mon article en disant que j'étais rabat-joie dans le passé, je vais éviter de l'être en ce moment.

 

Car oui, Noël a du bon. Mon exemple personnel n'est pas trop mal : Noël me permet de revenir chez moi. Chez moi, dans le Nord. Ça me permet de passer deux semaines avec ma famille, de revoir mes amis (plusieurs fois). Noël c'est la fête du rassemblement par excellence. Il n'y a pas d'autres moments dans l'année où tu es sûr de la présence de certains, si ce n'est ces jours-là. Je reviens l'été, mais d'autres sont à ce moment là partis en vacances, en voyage, ou travaillent. Noël c'est l'assurance de la présence du plus grand nombre.

Noël c'est aussi de la bouffe. Oui, difficile de parler de repas, tant j'ai l'impression que nous sommes des cochons que l'on souhaite engraisser. J'imagine d'ailleurs très bien la balance française, à savoir tous les habitants du pays, qui prend soixante-cinq millions de kilos au bas mot entre le 23 et le 26 décembre. Noël c'est aussi l'assurance du régime d'après-fête (pour beaucoup hein, n'imaginez pas que je me lance dans un régime!).
Noël c'est une certaine ambiance. Les gens peuvent être cons toute l'année, certains font tout de même des efforts à cette période. Ils lancent des « bonnes fêtes de fin d'année » dans les magasins, alors que d'ordinaire ils parlent à peine à la caissière. Les gens sont un peu plus souriants, un peu plus détendus (quoique, le stress des cadeaux...).

Et puis Noël c'est aussi... les SDF dans les rues. Quoi, rabat-joie ? Oui, un peu. Je rappelle qu'un peu plus de 400 personnes sont mortes cette année dans les rues de France. Un chiffre élevé pour un pays « riche ». On se rassure un peu, en se disant que les 10% les plus riches ont encore vu leur fortune augmenter cette année, et que la production française a augmenté de 0,3% au dernier semestre. Bizarrement, pour moi, la définition d'un pays riche n'est pas le nombre de riches dans le pays, mais le nombre de pauvres qui restent. Et force est de constater que la France n'est pas un pays riche, tout au moins pas un pays développé. Disons un pays injuste. Où des millions de Français s'engraissent le 24 et le 25 décembre, à en exploser, à en vomir, et surtout à en jeter la moitié. Et pendant ce temps là, dans les rues de France et de Navarre, il y a des milliers de SDF à qui on n'a pas voulu donner une petite pièce cette année, en pensant qu'ils ne la méritent pas. « C'est vrai, tout ça pour quoi ? Pour qu'il aille acheter une bouteille d'alcool avec ! Non merci ! ».
L'esprit de Noël, c'est aussi la dizaine de centaines de réfugiés qui errent dans les rues de Calais, vivant dans le dénuement, expulsés plusieurs fois des squats. Pendant ce temps, nous offrons des cadeaux stupides, des biens matériels inutiles, quand d'autres rêveraient d'une couverture et d'un bon lit.

Oui, je sais, j'avais dit de ne pas être rabat-joie cette année. Mais que voulez-vous, je n'y arrive pas. J'ai beau essayer, je reste effaré par tant de misère et d'injustice dans notre pays. Pire, j'ai l'impression que ça empire. Que chaque année c'est la même, que chaque année nous nous gavons quand d'autres galèrent. Que chaque année notre pays se rapproche de l'abîme, du Front National devenu premier parti de France. C'est sûr que c'est Noël, qu'on a envie de parler d'autre chose, que c'est des jours de fête où l'on essaie d'oublier les galères du quotidien, les petites misères et autres embrouilles. Que l'on se doit de profiter, au moins pour eux, pour ceux qui n'ont pas la chance de pouvoir vivre ça, de l'excès de nourriture et l'excès de bien-être. Mais ça ne nous empêchera pas d'y penser, d'imaginer la galère d'un Somalien ou d'un sud-Soudanais, d'un Syrien coincé entre deux régimes tyranniques, d'une femme tabassée parce que c'est Noël et que c'est aussi sa fête, d'un enfant pleurant ses parents partis trop tôt. On pensera aux absents, à ceux qui n'ont pas eu le temps d'en profiter. On pensera aux présents, mais qui ne peuvent pas en profiter.
Je ne veux pas faire le curé ou le pape, pardonnez ce sermon un peu maladroit, mais je suis comme ça. Noël, je n'y arrive pas. Je fais les efforts, j'essaie comme je peux, je ris à la mauvaise blague d'un oncle et je mets une cuillère dans ma bûche. Mais tout ça me dégoûte un peu, tout ça a un goût de faux et d'injustice. Mais ça ne m'empêchera pas de vous le souhaiter. Avec une drôle de grimace. Joyeux Noël à vous.

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commentaires

E
Je partage complètement ton avis. Voilà d'ailleurs une petite vidéo que j'aime beaucoup mais qui n'a pas l'air de faire beaucoup réagir malheureusement. https://www.youtube.com/watch?v=sWjHQkG66Ys
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