Deux semaines. Il y a deux semaines de cela, j'étais « chez moi », dans ch'Nord quoi, et je me préparais. J'avais finalement décidé de rejoindre la Guyane, après une réflexion assez contradictoire : je ne voulais pas partir, ça me semblait clair. Et puis, au cours de la semaine, c'était devenu une évidence : j'allais m'en aller. J'ai encore un peu de mal à comprendre ce changement soudain, peut-être cet élan de folie qui me porte depuis plusieurs années. Ou cette envie insatiable de découvertes et de nouvelles rencontres. Qu'importe. Après qu'Air Caraïbes m'ait déposé avec ses traditionnelles 3 heures de retard, je suis recueilli par Justine à Cayenne. C'est elle qui me permet une adaptation en douceur : un visage connu, ça change tout ! Quelques discussions, un bon repas, et une vue matinale qui me donne une vague impression de ce qui m'attend : mère nature est là, et en bonne forme !
Mercredi matin direction le centre-ville. La visite de Cayenne attendra, je suis déjà dans mon optique de rejoindre Saint-Laurent-du-Maroni, où je vais enseigner. C'est en bus que je traverse la Guyane du sud au nord, en suivant la route littorale (sans pour autant voir l'Océan). Saint-Laurent-du-Maroni (que j'appellerai désormais Saint-Lau) semble minuscule. Elle l'est ! 40 000 habitants, officiellement. Un super-U, le marché le mercredi et le samedi matin, le stade, quelques bars et restaurants. Je pense que j'ai déjà fait une grande partie de la ville après seulement deux semaines. Attention, c'est pourtant la sous-préfecture de l'ouest guyanais, et la deuxième plus grande ville du département (c'est comme ça que l'inspecteur me la vendait !).
Pas le temps de trop tergiverser, je suis en formation jeudi et vendredi. Je découvre mon lycée, certains de mes collègues, les coupures d'électricité (jusque 20 par jour... et c'est spécifique à mon lycée!). Après dix jours, je peux faire un petit point boulot : ça roule ! J'ai deux secondes, une première éco et deux premières gestion. Beaucoup de préparations de cours, forcément. En classe c'est plutôt calme et bosseur. Surtout, c'est un immense melting-pot : créoles, métropolitains, bushinengués (littéralement hommes de la forêt), Surinamais, Brésiliens et même quelques Amérindiens. Cela pose pas mal de questions de pédagogie (surtout au collège). Quelques trucs un peu chiants : je n'ai pas encore mes clefs de classe (car le monsieur doit aller à Cayenne la semaine dernière en refaire... bon j'attends toujours!), et je dois porter un pantalon. Non pas que je pensais y aller en caleçon ! Mais quand il fait plus de 30°C, c'est du sport !
Point météo : le soleil brillera jusque décembre. Quelques averses d'orage sont à prévoir. Les températures sont élevées et atteignent les 33°C à l'ombre. La nuit, il fait toujours 23°C. Revenant d'Inde, je ne suis pas choqué : je trouve même qu'il y a pas mal d'air ! (la plupart sont en désaccord avec moi, et le commerce de ventilateurs tourne à plein régime).
J'ai trouvé un logement dès mon premier week-end (cf. photos) : une colocation où nous sommes 5 (3 garçons, 2 filles... et j'ai fait passer le nombre de profs d'histoire à 3 !). Il y a de la place pour vous recevoir (et un matelas deux places). L'ambiance est sympa, ça facilite l'intégration.
Justement, celle-ci se révèle être très facile. J'ai un peu l'impression d'être dans un nouveau Erasmus, sauf qu'il n'y a que des Français et que nous sommes plutôt bien payés ! Je m'explique : beaucoup de métropolitains arrivent comme moi, sans famille, sans ami-e-s, bref, en solo ! Et tous sont dans la même optique : découvrir, et rencontrer. Dans ces conditions, tout le monde est ouvert d'esprit. Et même ceux qui sont là depuis une ou deux années me comprennent à mon arrivée : ils sont passés par là. Ainsi, on me prête une voiture alors que je suis arrivé depuis une heure ; on m'invite à des soirées sans même trop demander la permission à ceux qui l'organisent ; on me donne des coups de main pour m'installer... Je suis arrivé il y a deux semaines, et j'ai déjà l'impression d'être là depuis plusieurs mois ! Surtout, il y a le rythme. J'ai beau travailler, le rythme me semble très lent. Je peux faire beaucoup de choses, rencontrer du monde, aller en soirée, et il me reste encore du temps pour moi. Je ne comprends pas trop, je pense que la faible place de la télé (totalement absente) et d'Internet jouent beaucoup. C'est le retour dans une bulle, une bulle de présenteté. Pas de plan, pas de stress, hakuna matata.
Enfin (pour aujourd'hui, je vais éviter d'écrire un roman!), il y a les activités. Baignade dans le Maroni (c'est le fleuve), avec vue sur le Surinam. Baignade dans la crique crevette. Baignade à Awala, dans l'Atlantique Sud (cf. photos). Oui, je sais, ça fait beaucoup de baignades, mais à 40°C au soleil il faut me comprendre !
C'est assez loin de l'image que je me faisais de la Guyane... Car, quand je suis parti, j'imaginais la forêt dense, les araignées et l'humidité. Ca, c'est plutôt en s'enfonçant dans les terres. Sur le littoral, c'est ce genre de paysages que vous verrez. Ca donne envie, non ?