5 octobre 2012 5 05 /10 /octobre /2012 08:04

Dostoievski.jpgDostoïevski est entré dans mon estime quand j'ai commencé ma lecture de l'Idiot. J'avais tant entendu parler de ce livre en bien, notamment lorsque je voyageais à l'étranger, que je me suis décidé à entamer sa lecture, malgré les 505 pages. Ce fut mon premier pas dans la littérature russe, riche en descriptions et en visages, avec des noms dont on a mille difficultés à se souvenir. A la suite de cette expérience, j'ai décidé de poursuivre avec Dostoïevski, délaissant encore Tolstoï pour quelques mois/années.

 

Crime et Châtiment. Je ne sais pas pourquoi, mais ce titre fait très Jane Austen (la faute à Raison et Sentiments peut-être). Mais dès le départ j'ai reconnu l'excellence de la prose de l'auteur. La première partie a été avalée en quelques heures. J'ai suivi avec délectation et une certaine admiration les questionnements de Roskolnikov, hésitant et préparant à la fois le crime de l'usurière Aliona Ivanovna.


Le passage à l'acte est le tournant du livre, bien que placé dans la première des six parties. S'en suit le châtiment. Le châtiment effectif n'a lieu que dans l'épilogue, mais le châtiment mental et physique a lieu tout au long des cinq parties suivantes. Comment vivre avec un meurtre sur la conscience ? Cela semble être le grand questionnement de Dostoïevski, sans pour autant arriver à une réponse. Peut-être ne peut on pas vivre avec cela, comme cela semble être le cas avec Roskolnikov, passant par des moments de pure folie, devenant totalement paranoïaque, persuadé que la police est au courant de tout.

 

Pour expliquer le meurtre, l'auteur utilise des procédés très nietzschéens, où le nihilisme prend tout son sens (Dostoïevski évoque très souvent cette notion, notamment dans Les frères Karamazov où il constate que « si Dieu n'existe pas, tout est permis » ). De son côté, Nietzche fit l'éloge de l'auteur : « Dostoïevski est la seule personne qui m'ait appris quelque chose en psychologie ».Raskolnikov pense en effet que seuls les grands hommes peuvent se permettre de défier la moralité et la loi, comme il le fait en tuant quelqu’un. Cette justification ne l'aide cependant pas à affronter les conséquences de son geste. Peut-être est-il trop lâche, comme il le dit à la fin du livre. Il ne ferait donc pas partie de ces grands hommes, il n'est pas le nouveau Napoléon, qu'il prend tout au long du livre pour exemple, pour expliquer son acte. Dostoïevski ne contredit donc pas totalement cette théorie, mais il présente ici son insuccès, et l'extrémisme que cette théorie pourrait avoir, puisque un homme pourrait se croire supérieur alors qu'il ne l'est pas.

 

Pour expliquer l'impossibilité de vivre avec un meurtre sur la conscience, une partie religieuse, passant par le salut et la souffrance, semble être la vision de l'auteur. Le fait que ce soit une prostituée qui l'amène à se dénoncer est un véritable symbole. Les nombreuses références à Dieu et à la religion excluent presque automatiquement Dostoïevski et cette œuvre de l'univers existentialiste.

 

Cependant, ce livre emprunte un univers philosophique important, avec de longues tirades sur l'existentialisme, la capitalisme ou le communisme. Il faut parfois sérieusement s'accrocher et relire trois fois certaines phrases afin de pouvoir les assimiler. Mais si vous souhaitez comprendre les douleurs psychologiques qu'un homme peut endurer lorsqu'il a une mort sur la conscience, ce livre peut être votre bible. Et ne soyez pas rebuté par les 504 pages.


Citation : Les rêves se distinguent souvent par le relief, la clarté et la grande ressemblance avec la réalité. Il se forme parfois des tableaux horribles, mais la mise en scène et le processus même de la représentation sont si vraisemblables, si pleins de détails tellement délicats et inattendus mais correspondant si artistiquement à la plénitude du tableau, que celui qui rêve ne saurait en imaginer de pareils éveillé, fut-il un artiste comme Pouchkine ou Tourgéniev.

 

J'aime cela, qu'on se trompe. C'est la seule supériorité de l'homme sur les autres organismes. C'est ainsi qu'on arrive à la vérité. Je suis un homme et c'est parce que je me trompe que je suis un homme […] Une erreur originale vaut peut-être mieux qu'une vérité banale.

 

La souffrance, la douleur sont inséparables d'une haute intelligence, d'un grand cœur.

 

La raison est l'esclave de la passion.

 

Quand ils n'ont pas réussi, les meilleurs projets paraissent stupides.

 

Le criminel, au moment où il accomplit son crime, est toujours un malade.

 

Partager cet article
Repost0

commentaires