J’ai découvert Courbet lors d’un voyage de première (lycée Ribot représente ouech). Nous étions au sein du Musée d’Orsay, magnifique recyclage de l’ancienne gare. Et, devant moi, l’origine du monde. Adolescent de 17 ans, j’avoue avoir été choqué. La forme, le détail, et tout cela exposé dans l’un des plus grands musées français. A notre retour dans la capitale audomaroise, notre professeur d’histoire-géographie, Madame Dalbert, nous demanda, dans un souci d’éducation artistique, d’écrire une petite page sur une œuvre de notre choix, rencontrée dans les musées visités. Un travail de groupe que j’ai voulu axer sur ce tableau. Mais à 17 ans, la fainéantise est grande, Football Manager occupait la plus grande partie de mon temps disponible et Internet balbutiait encore. J’ai donc fait un joli copier-coller d’un résumé de l’œuvre trouvé sur la toile. Et sans même le lire, je le rendis à ma professeure, mes partenaires me faisant la plus grande confiance.
Quelques jours plus tard notre professeur nous explique qu’il faudra refaire le travail. Pourquoi ? Parce que sur le résumé était écrit : « car il faut bien appeler une chatte une chatte » (sic !) Pardonnez-moi la vulgarité de mes écrits mais il faut reconnaître la stupidité de mon comportement.
Bref, j’ai découvert Gustave Courbet. Et je ne l’ai plus lâché.
Deux autres de ses tableaux me fascinent. Un enterrement à Ornans. Dans le style réaliste dont Courbet était le chef de file, le tableau représente une scène commune à chaque village. L’enterrement à Ornans reste cependant un des grands mystères du peintre : qui enterre-t-on ici ? Ou qu’est-ce ? Nous sommes en 1850, la Seconde République est dirigée par Louis-Napoléon Bonaparte. Deux révolutionnaires sont à la droite du cercueil. Enterre-t-on ici la Révolution de 1848 ? Courbet reste fameux pour son engagement politique, très marqué par le socialisme. Il sera d’ailleurs accusé d’avoir abattu la Colonne Vendôme à Paris lors de la Commune de 1870, et devra la restaurer à ses frais.
Le tableau a suscité la polémique au salon de 1850. Représenter ainsi les gens du peuple dans de telles dimensions (6,68 m x 3,15 m). Des dimensions réservées jusque-là à des scènes religieuses, mythologiques, historiques. Au sacre de Napoléon par David par exemple. La grande bourgeoisie parisienne resta choquée par tant de laids. Mais contrairement à la Révolution de 1848, tuée dans l’œuf par l’avènement de Bonaparte le second, bientôt empereur, la révolution artistique du réalisme n’en est qu’à ses débuts. Au revoir romantisme.
Le désespéré. Un autoportrait datant de 1843-45. Regardez moi ce visage, regardez moi ce regard. Des yeux vous fixant ainsi. On sent la passion, la fureur, le désespoir, l’incompréhension. C’est mon autoportrait favori (et pourtant j’apprécie Rembrandt), malheureusement conservé dans une collection privée.
De Courbet on pourrait encore présenter L’atelier du peintre ou Les cribleuses de blé. Mais je préfère m’arrêter sur ces trois coups de cœur. Mes chefs d’œuvre.