10 janvier 2023 2 10 /01 /janvier /2023 10:59

Ô dilemme.

Cela fait maintenant trois ans que cette question me touche avec une certaine force. Les deux années précédentes, j'habitais en Guyane, et je ne me voyais pas trop revenir autrement (quoi que la traversée d'un océan en bateau me fascine). D'ailleurs, l'avion, pour moi, était quelque chose de fascinant. Gamin, tu regardes les avions dans le ciel. A l'adolescence, j'ai pris une option aéronautique qui était une chose bien obscure au collège de l'esplanade. Un cockpit, un avion de chasse, le Concorde, les avions cargos, l'A380, tout cela m'impressionnait.

A cette époque, pour moi, le voyage en avion était pour les riches. Ce n'est pas avec mes parents qu'on allait faire ça, mes grands-parents n'avaient jamais mis les pieds dans ce type de transport, et, dans toute ma famille, seul un oncle avait pris l'avion (et c'était payé par l'armée pour aller... en Centrafrique... tu parles de vacances!). Alors, quand à 20 ans, j'ai pris l'avion pour la première fois avec ma sœur, direction l’Égypte (pour voir les petits trucs pointus, vous savez, non, pas celle de Serques, les autres, un peu plus anciennes, oui, c'est ça, les pyramides !), j'ai eu l'impression d'entrer dans la classe aisée. Je restais bien sûr très « économique », mais le simple fait de mettre un pied dans cet avion de Lotus Airlines, compagnie charter égyptienne disparue en 2011, était le signe d'une ascension sociale : j'avais travaillé mes week-ends pour me payer ce grand voyage (à 650€ tout compris), et l'avion était une récompense méritée. Quand je suis arrivé à l'aéroport, je regardais tout, comme un gamin. Je trouvais ça super de faire la queue pour enregistrer mes bagages. Et le premier décollage, bon sang ! Newton pouvait ranger sa pomme, on partait dans le ciel ! Il y avait de l'excitation, un peu de peur, et beaucoup d'impatience. La France vu du ciel, les nuages, si beaux quand on les domine.

Puis est venu Ryanair. Et ses prix, défiant toute concurrence. Quand je disais à ma famille que je partais en Suède/en Italie/en Finlande pour 15€ aller-retour, tous se méfiaient ! « Ryanair, ce n'est pas très solide » ; « avec un prix comme ça, t'es sûr qu'ils mettent de l'essence ? » etc. Et moi, qui avais l'impression d'avoir trouvé la lampe magique. Ryanair, ce fut ma découverte de l'Europe. Ce fut la possibilité de continuer une relation entamée pendant mon année Erasmus. Ce fut un tour d'Espagne rendu possible par la ligne Lille-Girona (qui s'arrêta la semaine suivante!). Ryanair, ce sont tellement de souvenirs de nuit d'aéroports entre deux escales chelous ; de lieux où tu n'imaginais pas aller (Brême ou Tampere) ; Ryanair, c'était le temps du « tout est possible avec trois kopecks en poche ».

L'Europe était devenue petite à mes yeux. Je regardais mon planisphère, envieux. New York m'appelait. Pas mon plus grand souvenir de voyage [hum, hum], mais un grand d'escale, en Islande, dans cet hiver 2010-2011. Du ciel, tout était si fou, si beau. Et quand j'ai dit à mes parents, « je pars faire un tour du monde », mon père a réagi tout de suite : « remets un peu les pieds sur terre, un tour du monde c'est pas pour nous ». Mais c'était trop tard, je volais, je volais à 10 000 pieds, le monde était petit, et j'étais devenu riche, riche de mes voyages, riche de mes découvertes, connaissant les bons plans pour voyager pas cher. Un avion direction Moscou, et me voici en tour du monde. 24 ans, et pas de limite.

Sauf que la planète, elle, a des limites. Ça, je l'ai compris au fur et à mesure de mes voyages. Je pense d'ailleurs que ce sont eux qui m'ont rendu écolo. Quand tu vois la pollution de Pékin, les déchets de Madras, les industries lourdes russes côtoyant des lacs très sombres... tu ne peux rester insensible. Respirer l'air pur, ne pas vivre aux milieux des excréments, et boire de l'eau potable, cela redevient ta base. J'ai lu, j'ai discuté, j'ai compris. Le réchauffement climatique, c'est nous. Le réchauffement climatique, c'est moi. J'ai vu les chiffres d'un voyage en avion. Mon Paris-New York c'était plus de 2 tonnes de CO². Or, 2 tonnes, c'est ce que nous devons émettre chacun, par an, pour réussir à limiter les effets du réchauffement.

Et, ainsi, aujourd'hui, je me retrouve avec mon dilemme. Car, si ce n'était que moi, je limiterais mes déplacements en avion à un par an, maximum. Je me recentrerais sur la France, la Belgique, les Pays-Bas, l'Angleterre. Je ferais davantage de tourisme régional. Ça fait moins rêver ? Peut-être. Mais ça m'irait... Forcément, « toi, tu as déjà voyagé dans 70 pays ! ». Oui, et c'est là mon problème : je ne me vois pas dire qu'il ne faut pas prendre l'avion pour voyager à l'autre bout du monde quand je l'ai déjà fait énormément. C'est un peu le type qui s'est goinfré 5 parts de gâteau et qui dit à l'invité qui vient d'arriver « non, ne prends pas de gâteau, il faut le préserver pour les générations futures ». Je suis très mal placé pour parler, et c'est pour cela que je ne donne de leçon à personne sur cette thématique.

Surtout que les voyages font la jeunesse. Réellement. J'ai sans aucun doute appris autant au cours de mes périples à l'étranger que dans les amphithéâtres de l'université. Alors, certes, je n'ai pas beaucoup fait de voyages « touristes », en mode all-inclusive, je ne sors pas de l'hôtel. Je dormais souvent gratuitement chez l'habitant via ce merveilleux site qu'était Couchsurfing, je me suis retrouvé dans un mariage vietnamien, un village zambien même pas recensé par Google et à dormir dans un squat espagnol très chelou. J'ai discuté démocratie et contournement de la censure avec des Chinoises, mariage arrangé et religion avec un Indien, homosexualité avec un Brésilien, et rapport blanc-noir avec des Kényans. Ces voyages, sans l'avion, eussent été compliqués à mettre en place. Je sais ce que je dois à l'industrie aéronautique.

Alors, quand ma copine qui a peu voyagé souhaite partir à l'autre bout du monde, je ne me vois pas refuser. « Tu ne connais pas l'Asie, tu souhaites découvrir la Thaïlande ? Bon sang, comme je te comprends. Quel pays fascinant ! Quelle culture millénaire ! Cette nourriture, cette nature, les animaux, les temples, cette mer... Oh, politiquement c'est aussi un sacré bordel ! » Alors on ira. Alors on y va. Après-demain, je décollerai à nouveau. Et, à côté de ça, je devrais être quasiment irréprochable. Je pèserai ma poubelle chaque semaine pour essayer de réduire mes déchets. J'achèterai bio. Je ne prendrai presque plus ma voiture pour travailler. Je limiterai au maximum mon impact numérique, électrique, gazier. Et j'essaierai de sauver le voyage. Car rencontrer quelqu'un à l'autre bout du monde, et parler avec lui d'humain à humain, est sans aucun doute l'une des plus belles choses que j'ai faite, et je souhaite à chacun de pouvoir le faire un jour.

Enfin, est-ce que je reste « écolo » quand je rentrerai dans cet avion ? Hum, c’est toujours selon la définition d’ « écolo ». Car certains se plaisent justement à nous voir comme des gens voulant retourner à l’âge préhistorique, avec nos lampes à huile, mangeant des racines, et souhaitant tout interdire. Il me semble que, pour beaucoup, notre position est plus mesurée. Combattre l’omniprésence des bagnoles dans les centres-villes, clairement. Revoir un modèle fondé sur le « produire plus à tout prix », bien sûr. Décroissance n’est clairement pas un mot qui nous fait peur. Et, concernant l’avion… favoriser le train. En espérant que la SNCF cale un jour ses prix sur ceux de Ryanair. Alors, oui, je me définirai toujours comme un écolo. Sans doute avec une belle contradiction comme l’humain est capable d’en faire. Mais en l’ayant en tête.

Peut-on voyager en avion et être écolo ?
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31 décembre 2022 6 31 /12 /décembre /2022 17:01

Après deux années à subir le COVID, 2022 nous aura permis de retrouver une vie normale, « le monde d'avant » comme ils disaient : la guerre, les effets du réchauffement climatique et une crise économique qui s'annoncent. Formidable !

Je commence en étant un peu sombre, mais, en vérité, cette année 2022 fut très belle pour moi. J'ai commencé janvier en lâchant l'éducation nationale. C'était un peu leur faute : il me demande d'enchaîner des CDD (et j'étais motivé pour ça), mais refuse de payer le week-end entre deux contrats. J'ai bien expliqué que les cours du lundi 8h n'étaient pas fait le lundi entre 4h et 7h, ça n'a pas suffi. Des logiques de comptable qui m'échappent toujours, et un au revoir bienvenu. En janvier, je décide d'écrire mon livre sur l'histoire de Houlle. Ce deuxième ouvrage d'histoire locale m'a confirmé ce que je savais depuis plus d'un an : je prends à nouveau du plaisir à faire de la recherche historique. Mon doctorat m'avait quelque peu fait divorcer avec ce monde, me voici réconcilié. Le fait de rechercher et d'écrire sur des lieux que je connais, où je me sens légitime, facilite la démarche.

 

2022, le zapping

En février, surprise ! Yannick Jadot et EELV ont besoin de moi ! Me voici à travailler pour la campagne du candidat à la présidentielle. Pas un grand succès au niveau des votes, mais une belle expérience de chargé de mobilisation sur le NPDC. Voir le fonctionnement d'un parti, comprendre certains choix stratégiques (et parfois ne pas les comprendre), découvrir une grosse machine en période électorale, c'est un monde qui attisait ma curiosité. J'en garde des bons souvenirs.

2022, le zapping

2022 ce fut le retour des voyages. Le COVID disparaît peu à peu, les frontières s'ouvrent, direction la côte amalfitaine, le Vésuve, Pompéi en amoureux, puis Valence en famille.

2022, le zapping

Au retour des vacances de printemps, je reprends mon cartable, mes stylos rouges et ma clef USB, le rectorat m'envoie à Calais. Sophie Berthelot, le lycée de ma mère (et de bcp dans ma famille), où je peux enfin me rendre en train, avec mon vélo. Enseigner, transmettre, partager, avec des élèves qui semblent intéressés. Oui, j'aime ce boulot. Et pourtant, depuis, je n'ai pas repris.

 

Au mois de juin, ça bouge dans ma vie, dans notre vie. Les clefs d'une maison. Après plusieurs visites, nous parvenons à concilier maison dans le centre et maison au calme. Place St Jean, me voici propriétaire. J'entre dans un nouveau monde, celui des taux d'intérêts, des rdv chez le banquier, des frais de notaire et des travaux... nous y sommes toujours, mais ça avance, tranquillement !

2022, le zapping
2022, le zapping

Juillet. Un road-trip en Turquie avec 3 enfants ? Challenge accepted ! De Troie à Pergame, d'Ephèse à Pamukkale, de la Capadoce à Istanbul, nous voici sur les traces de la Grèce et de la Perse antique, de la route de la Soie et d'Atatürk. Un voyage magnifique, et des enfants conquis par le style. Formidable !

2022, le zapping

Bon, les vacances en famille, c'est bien, les vacances à deux, c'est encore mieux ! C'est parti pour des grandes randonnées en Slovénie, à la recherche des ours ! (sans succès!). On passe par Salzbourg et même le Liechtenstein (Chloé a adoré!).

2022, le zapping

2022 ne fut pas mon année la plus sportive, elle est restée dans la moyenne. Du football une fois toutes les deux semaines (moyenne sur l'année), du vélo et un challenge : le Mont Ventoux. Les fesses de Greg s'en souviennent encore !

2022, le zapping

A la rentrée, plus de cours, un nouveau projet : l'histoire des inondations dans le marais audomarois. J'ai été contacté à la suite de mes deux livres par le SmageAa, en charge de la gestion de l'eau. Concilier l'histoire et l'environnement, autant vous dire que j'étais tout de suite motivé. Beaucoup de découvertes, et du plaisir à faire les recherches. Me voici donc officiellement « historien » !

 

Cette petite liste 2022 n'est pas tout à fait complète : je n'évoque pas les musées parisiens en janvier, le bowling, le parc Astérix, une communion, un mariage, Rennes en famille, des conférences, Dunkerque avec les copains, un retour à la Boucherie, un road-trip jusque dans le Bordelais et à Pau, et je suis devenu parrain pour la seconde fois.

Mais, surtout, en 2022, j'ai aimé et été aimé pendant une année. C'est beau la vie.

 

Quant à 2023, je suis sûr qu'il y aura beaucoup de surprises. Pensez, j'ai même eu un smartphone cette année ! (trois mois, mais ça compte!).

2022, le zapping
2022, le zapping
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16 décembre 2022 5 16 /12 /décembre /2022 08:50

Il y a des personnes avec un parcours de vie inspirant. Original. Voire complètement loufoque. Et puis il y a le tien. Où tout avait une certaine logique, une sorte de destinée. Oh, non, je ne crois toujours pas à cette notion de destin. Mais, pour toi, je pense qu'il y avait un sens à tout ça.

Je te rencontre avec une étiquette pas commune : tu es le compagnon de la mère de ma copine. C'est quelque chose de particulier, un beau-père, c'est même souvent méfiant d'ordinaire ! Et, la première fois que je te croise, je vois ce grand sourire, ce bon sourire, ce sourire dont tout le monde fait continuellement mention à l'enterrement. C'est facile, c'est l'image que les gens garderont de toi : un grand monsieur aux cheveux ébouriffés souriant à la vie. A moi aussi, d'ailleurs. Je sens tout de suite de la bienveillance, et une vraie intelligence. Des mots qui mettent à l'aise. Et un humour ravageur. Je suis pourtant surpris. On m'a dit que tu étais prêtre. Depuis quand les prêtres ont-ils de l'humour ?

Un prêtre qui quitte les ordres pour se marier. Ouah. Là, j'avoue, je trouve cela formidable. Car ce choix n'est pas fait à 30 ans, mais à 67. Ce n'est pas sur un coup de tête, ce n'est pas la crise de la quarantaine (ça existe aussi chez les prêtres?), c'est une décision que tu as mûrement réfléchie. J'imagine un cerveau en ébullition, j'imagine la pensée pour les fidèles, pour leurs réactions, pour les collègues, pour leurs réactions. Et j'imagine aussi la pensée pour Dieu, car tu dois forcément l'avoir. Il y a une partie de moi qui pense : « Eric a quitté Dieu pour se marier avec ma belle-mère ». Cette phrase me fait sourire. Et ce choix semble si tardif qu'il peut être incompris. Je n'avais pas toutes les cartes en main.

Quelques semaines plus tard, au cours de mes recherches professionnelles, je tombe sur toi. Oh, pas vraiment le même. Tu as alors 11 ans. Et j'observe ton nom dans le journal. Je vois ta photo, en compagnie de tes parents. Je te reconnais de suite. Ce sourire, c'est toi, c'est le même. Eric, en photo, dans la Voix du Nord, le 10 décembre 1964. Tu es alors un rescapé. Un survivant. Un miraculé.

La catastrophe de Bourg-Saint-Maurice le 16 août 1964 traumatise la France entière, Arras en particulier. Un bus transporte une colonie de vacances, le véhicule tombe dans un ravin, effectue de multiples tonneaux, et s'écrase 70 mètres plus bas. La photo est terrible. Le bilan aussi : 17 morts, 58 blessés dont 16 dans un état grave. Je savais que tu avais connu un accident, je ne savais pas que c'était celui-ci. Pour toi, c'est une petite mort. Au revoir l'enfant que tu étais. Un an d'hôpital, de multiples opérations, des blessures incrustées dans ta chair pour le reste de ta vie. Cet accident, tu en parlais régulièrement. Tu as raconté les chants dans le bus, puis les cris des enfants, les appels à leur mère, et ce ciel, si bleu.

Eric Merlier (1953-2022)

Forcément, cet accident change la perspective que j'avais sur tes choix de vie. Je me disais jusque là : quel parcours ! Et, maintenant, je me dis : « quel parcours », avec un peu plus de tristesse dans la voix. Être un miraculé, ça met du poids sur les épaules. Il faut vivre pour les autres, pour ceux qui n'ont pas eu cette chance. Tu étudies les arts appliqués (et les enfants te remercient encore pour tous les dessins), puis tu deviens CPE. Avant d'entrer au séminaire, Béthune, Boulogne, Saint-Omer, Bapaume. Un voyage professionnel, un voyage dans la vie.

A ton mariage, tu étais fascinant. Heureux. Joyeux. Presque déjanté. Je te vois danser lors de la cérémonie, je te vois prendre le micro dans un one-man-show aux blagues parfois osées. Je souris, comme toute la tablée. Je vois ce bonheur, je vois votre bonheur. Ils s'aiment. Et il aime la vie.

Trois mois plus tard, tu es sur ton lit de mort. C'est étrange. Ça passe si vite, parfois. Une question de chance. Mais je sais que tu considères en avoir eu énormément. Finalement, tu étais déjà un peu mort en 1964. Le reste, c'est 58 ans de bonus. Tu étais prêt, sans doute plus que n'importe qui, pour le dernier voyage. Tu avais les mots, tu savais que c'était la dernière fois. Et tu souriais, toujours.

Cet enterrement était très différent. Pensez, 16 prêtres devant moi. Dans l'église, de Bapaume à Boulogne, d'Arras à Saint-Omer, beaucoup ont fait le déplacement pour un dernier hommage à leur ancien prêtre. Et nous, sa « famille de cœur ». Je vois un religieux musulman avec lequel tu aimais échanger prendre la parole, et lancer un appel pour la paix. J'entends parler de ton engagement auprès des prisonniers. Et j'entends encore, beaucoup, parler de ton grand sourire.

 

C'est dommage, j'eusse aimé discuter un peu encore avec toi, je suis sûr que tu avais beaucoup de choses à m'apprendre. Mais j'ai déjà eu la chance de te connaître, avec ce parcours de vie si spécial. Au revoir Eric. Et merci.

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8 septembre 2022 4 08 /09 /septembre /2022 11:42

La route est un peu plus longue que prévue. Sur notre carte, cela semblait à peu près rectiligne, mais les Alpes compliquent notre arrivée. D'ailleurs, nous ne nous rendons pas vraiment compte, ah, ça y est, c'est ici ? Entre l'Autriche et la Suisse se trouve un pays à la prononciation singulière, un gros caillou qui se dit être l'un des 193 pays du monde. J'ai vérifié, c'est officiellement le cas ! Et pourtant, il n'y a vraiment pas de quoi !

 

Déjà, on ne peut pas parler d'une histoire millénaire. Le pays est en fait un bout de l'Autriche jusqu'à ce qu'une famille de nobles, la maison de Liechtenstein, achète deux mini-comtés (non, pas le fromage). Il faut ainsi attendre 1719 pour voir ce territoire devenir une principauté du Saint-Empire-Romain-Germanique. Bon il y en avait déjà 342, alors une de plus ou une de moins... Mais les filous réussissent à se maintenir en État jusqu'à aujourd'hui en proclamant notamment leur neutralité dès le XIXème siècle et en supprimant leur armée. Bien aidés par les Suisses, ils ont aussi leur modèle économique...

 

Trois ronds-points, on cherche un parking. On se croit dans une petite ville désaffectée du centre de l'Auvergne. Il n'y a pas grand monde dans les rues. Difficile de se croire dans une capitale européenne. Pourtant Vaduz est bien la capitale du pays, avec ses 5701 habitants ! Oui, là, on compte à l'habitant près ! On essaie de trouver le « centre ville », honnêtement c'est pas foufou. Ah, la mairie, une rue piétonne, nous y sommes. Les restaurants sont fermés, nous sommes vendredi soir. Surprise. Nous regardons les horaires : ils sont ouverts du lundi au vendredi midi. Pourquoi ? En fait, le Liechtenstein semble surtout être un pays du lundi au vendredi, sur les heures de bureau. Vaduz est même le 69ème centre financier du monde avec 74 000 multinationales implantées ! Oui, en ayant 5701 habitants. Vous le voyez venir gros comme une banque suisse, le pays est un paradis fiscal (enfin, pas selon l'UE et l'OCDE, mais les chiffres sont têtus). Nous y croisons d'ailleurs des cabinets d'avocats fiscalistes, des boites aux lettres (beaucoup), des banques, et pas grand chose d'autre !

Cela s'en ressent sur les prix. Nous allons dans le seul restaurant ouvert, et le litre d'eau gazeuse à 9€50 nous fait tout drôle ! (Chloé apprécie modérément ses pâtes à la tomate à 18€).

 

Pas d'histoire, un paradis fiscal... mais pourquoi le Liechtenstein existe-t-il encore ? Peut-être en raison de son système politique très progressif... Le droit de vote des femmes a été accordé en 1984, l'avortement est illégal, et le prince dispose de pouvoirs comme on n'en voit plus jamais en Europe (il peut mettre son veto à un vote de l'assemblée, à un référendum et même arrêter une enquête pénale!).

 

Quelques vignobles, un musée d'art, et le château de Vaduz, résidence officielle d'Hans-Adam II. Celui-ci a une petite fortune estimée à 3 milliards d'euros... Voilà pour notre découverte d'un nouveau pays, sous la pluie. Supprimons-le !

Le Liechtenstein, un pays ?
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5 septembre 2022 1 05 /09 /septembre /2022 09:56

Les sommets empruntés par le tour de France se résument avec des chiffres qui parlent aux connaisseurs : 21 kilomètres depuis Bedoin, pour la montée la plus difficile. 1600 mètres de dénivelés. Une pente moyenne de 7,5%, avec un maximum à 11%. Et, au final, l'arrivée à 1912 mètres d'altitude sur la scène la plus mythique du grand tour. Quant à 55 minutes et 51 secondes, ce n'est pas l'objectif, c'est le record établi en 2010 par Iban Mayo lors d'un contre la montre.

 

Après avoir gravi les 21 lacets de l'Alpe d'Huez l'année dernière (14,6 km), me voici de retour avec un col hors catégorie, « beaucoup plus dur » d'après les témoignages. Deux choses peuvent effrayer : la distance, et la météo. Honnêtement, je ne suis pas inquiet pour les 21km, l'Alpe d'Huez m'a rassuré et j'ai un peu roulé les deux mois précédents : 50 bornes en juillet, 200 bornes en août.... bon ce n'est pas une préparation de fou (les cyclistes doivent rire en voyant les chiffres), et, en plus, c'était principalement du VTT dans le Pas-de-Calais, l'un des coins les plus plats de France ! Ce qui m'inquiète vraiment, en revanche, c'est le climat. Pas tant la chaleur que le vent. C'est mon unique souvenir du Ventoux quand j'étais gamin : la voiture qui fume une fois arrivée en haut, et un vent hallucinant nous obligeant à rentrer illico presto. Mais, bonne nouvelle, les orages annoncés quelques jours auparavant ont disparu, et nous avons le droit à des conditions optimales : 20 degrés, grand soleil, un régal !

 

Nous sommes 3, Lucas, Greg et moi. Nous avons loué des vélos à Bedoin, 8,5kg, qui me changent sacrément de mon gros et lourd VTT. L'objectif est clair : arriver en haut ! Et, ce serait mieux, ensemble ! Deux bidons remplis, quelques pâtes de fruit dans la poche, le casque sur la tête et, chose nouvelle pour moi, des chaussures adaptées. En selle !

 

Alors qu'on entrait directement dans le dur à l'Alpe d'Huez (2 km à 10%), les cinq premiers kilomètres du Ventoux sont parfaits pour la mise en jambes : on alterne entre 3 et 5%. Physiquement, c'est important, on s'habitue au vélo, on passe les vitesses. Mentalement aussi, c'est important : notre montée se réduit ainsi très vite à 16km ! Car le géant de Provence est constamment à nos côtés, sur notre gauche. On observe son sommet iconique, et on réalise bien que c'est très haut !

 

A la sortie de Sainte Estève, virage à gauche, et c'est parti pour la montée, la vraie ! Elle se décompose en 3 étapes : 9 kilomètres entre 8 et 10% jusqu'au Chalet Reynard, puis 4 kilomètres à 6% avant les 3 derniers entre 8 et 11%.

L'ascension du Ventoux

La première étape se déroule dans la forêt. Nombre de cyclistes sont autour de nous, enfin, derrière, puis devant (en clair : on se fait dépasser régulièrement!). Nous essayons de trouver notre rythme, aux alentours de 8km/h. Nous n'avons pas de réels objectifs temps, hormis de faire moins de 3 heures. Mon but premier reste d'aller en haut sans mettre pied à terre. Assez rapidement, un membre du groupe, que nous appellerons « lapin » pour ne pas le dénoncer, souffre d'un mal de fesses important. La selle, cruelle, ne semble pas adaptée à son fessier. 6ème km, 7ème, au 8ème il me dit qu'il veut s'arrêter. Lucas est un peu devant, en train de fricoter avec un autre cycliste, et j'essaie comme je peux d'encourager mon lapin à poursuivre l'aventure. « Allez, tu peux y arriver. Allez, au moins jusqu'à la moitié ensemble ». Mais la douleur est trop forte. Après une petite heure d'efforts, un peu après le 9ème kilomètre, Lapin se met sur le côté, repose son fessier, tandis que je rejoins mon dernier compagnon. Perdre un homme au combat, tristesse.

 

10 km, mes sensations sont bonnes. Nous doublons deux-trois personnes, discutons avec un type... qui habite dans l'Audomarois. Lui fait la montée trois fois pendant les vacances et il connaît le lieu comme sa poche, nous distillant quelques conseils et anecdotes. Faire 900 bornes et parler du pays, c'est donc ça le Ventoux ! Il nous accompagnera quasiment jusqu'au bout.

Chalet Reynard. Cela fait 1 heure 40 que nous grimpons, et nous sortons de la forêt. Le mont Ventoux devient chauve, nous sommes entourés par la roche calcaire blanche, et le soleil tape sur nos casques. Pas un souffle de vent, et le sommet en vue, 6 kilomètres devant nous ! Je me ravitaille un peu (je bois à chaque borne kilométrique, j'avale un peu de sucre en poudre et une pâte de fruit... non, pas d'EPO, une analyse d'urine peut le prouver!). La pente s'apaise un peu, à 6%, pendant 4 kilomètres. Le souffle et les jambes répondent toujours bien pour mes deux compagnons et moi-même. La vue se dégage, la Provence s'ouvre à nous. Le lieu est magnifique. Quelques photographes nous tirent le portrait, l'ambiance est toujours sympa avec les autres cyclistes. Bon, s'il y a assez peu de voitures par rapport à l'Alpe d'Huez, il y a beaucoup plus de vélos électriques, et c'est toujours frustrant de se faire dépasser par une femme de 65 ans qui discute des petits-enfants sans perdre son souffle pendant que toi tu es concentré pour chaque effort !

L'ascension du Ventoux

Après deux heures d'efforts, nous arrivons dans la dernière partie. La pente se redresse, entre 8 et 11%. C'est ici que le vent est normalement redoutable, et toujours pas un souffle. Je laisse notre nouvelle recrue audomaroise partir un peu en avance, je regarde un peu derrière moi, sentant que mon fidèle compagnon Lucas est un peu plus en difficulté. Nous passons devant la stèle de Tom Simpson, décédé ici en 1967 (un mélange de soleil, de fatigue... et d'amphétamines), recouverte de bidons, casquettes et autres objets déposés là par des fans. 2 heures 15, il reste un kilomètre. Je décide d'accélérer un petit peu pour profiter (et faire moins de 2 heures 30). J'ai encore des réserves, et ce dernier kilomètre, logiquement le plus dur, est assez facilement avalé. 2 heures 23 minutes, et j'y suis ! Lucas arrive 5 minutes plus tard (et là je comprends les écarts que l'on peut faire en l'espace d'un kilomètre sur le Tour!). J'imagine Greg un peu tout seul dans la pampa, je décide de redescendre pour l'encourager un peu. Il lui reste justement les 2 derniers kilomètres, et c'est dur mentalement, mais aussi physiquement (ah, le fessier...). Il arrivera lui aussi tout au bout, tout là haut.

L'ascension du Ventoux

Une fierté. Nous y sommes donc arrivés. Autour de nous, il y a bien une centaine de personnes, peut-être plus, qui viennent de faire la même chose. C'est toute une communauté qui savoure le moment, certains ouvrent carrément une bouteille de champagne, nous choisissons plutôt une boisson sucrée. Du côté du versant Nord, c'est un autre paysage, moins provençal : les Alpes sont au loin.

Reste la descente ! Là, ça demande de la concentration ! Nous la faisons en deux fois (on mange au chalet Reynard). Je mets 30 minutes pour revenir à Bedoin, avec des pointes à 60 km/h.

 

Le bilan : j'ai préféré le Ventoux à l'Alpe d'Huez. Le paysage est aussi beau, il y a surtout moins de circulation, et l'arrivée est iconique. On m'avait tellement vendu l'enfer que j'ai trouvé la montée plutôt facile à nouveau (mais je crois que le VTT perturbe ma vision : je me retrouve régulièrement avec des pentes à 15% sans goudron... et j'en chie tellement!).

Les alentours sont également très sympa (Vaison-la-Romaine notamment) et on a fait une bonne fête à Sainte Colombe (j'ai réussi à avoir les lacs du Connemara). Quant au mont Ventoux la nuit, c'est un lieu parfait pour observer la Voie Lactée !

 

Prochain challenge ? J'avoue que le Paris-Roubaix me donne envie. Bon plutôt le 70 km que le 170km (on me vend une nouvelle fois l'enfer... et je veux bien y croire cette fois!).

L'ascension du Ventoux
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29 juillet 2022 5 29 /07 /juillet /2022 13:24

La route de la Soie me fascine. Je rêve de l'emprunter depuis de nombreuses années, de parcourir l'Iran et les pays d'Asie centrale en suivant les traces de Marco Polo et des célèbres caravanes ramenant les épices et la porcelaine de contrées tellement lointaines qu'elles étaient devenues des mythes. Cette route, je l'ai rencontrée à ses débuts, à Xian, en Chine. Mais aussi à sa fin, Constantinople/Istanbul étant la principale porte d'arrivée pour les Européens. Les haltes caravanières sont nombreuses en Turquie, les fameux caravansérails. Et il y a aussi parfois des villes qui portent encore la trace de cette lointaine époque : direction Safranbolu.

La ville doit son nom à un crocus, le crocus sativus, petite fleur qui fleurit 20 jours par an, et dont la récolte, à la main, permet d'obtenir l'épice la plus chère du monde. Il faut dire qu'elle est un peu avare : il faut 150 000 fleurs pour obtenir un kilo de safran ! Ce fut notre petit coup de cœur. Une ville à taille humaine (50 000 hab), avec un centre agréable et un peu touristique, juste ce qu'il faut. Des vieilles maisons ottomanes, des loukoums délicieux et du calme dans les petites rues piétonnes du cœur de ville.

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !
Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

Nous en profitons pour faire un crochet jusqu'à la mer Noire, la quatrième mer du voyage. Les routes sont montagneuses, nous traversons la chaîne Pontique, dépassant les Renault 9 et 12, véritables stars en Turquie, mais un peu fatiguées dans les montées. Les paysages, où quelques nuages se mêlent aux forêts, font presque vosgiens.

 

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

Amasra est une station balnéaire prisée des Turcs des environs. Malheureusement, comme souvent là-bas, les plages sont habitées par des rangées de chaises-longues (et pourtant j'aime la chaise longue!), avec, juste derrière, des enceintes crachant de la musique turque. Aimant bien le calme et le bruit de l'eau, la sensation est mitigée. Le bord de mer est pourtant très joli.

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

Enfin, nous bouclons ce périple de 4400 km (!) par la grande, la belle, la fascinante Istanbul. 15 millions d'habitants (1 million en 1960!), une histoire millénaire entre Byzance et Constantinople, où se croisent Alexandre le Grand, Septime Sévère, Constantin, Justinien, les croisés, Mehmet II et Soliman le Magnifique pour arriver à Mustafa Kemal et Erdogan. Cette ville, je l'avais découverte en 2009, le temps d'une journée, et j'étais tombé sous son charme. Elle est toujours fascinante, sans doute un peu plus touristifiée (on entendait parler français à tous les coins de rue!), et déjà différente. Il y a 13 ans, je me souviens d'une circulation débridée. Aujourd'hui, les rues piétonnes sont très nombreuses et nous n'avons pas vu d'embouteillages ! Il y a 13 ans, Sainte-Sophie était un musée assez cher ; aujourd'hui c'est une mosquée gratuite où Marie est recouverte d'un voile blanc. Erdogan a fait plaisir aux plus conservateurs de son parti, dans un pays où le kémalisme laïc d'Atatürc est pourtant omniprésent ! Deux tunnels passent aujourd'hui sous le détroit du Bosphore quand il n'y en avait pas en 2009 ! La ville bouge, vit, impose son dynamisme au pays et à tout le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord. Istanbul est une métropole mondiale, avec quelques-uns des fléaux habituels (coucou la pollution et les SDF). Pour nous, ce fut une dernière traversée entre Europe et Asie, des déambulations dans les bazars où la foule rappelle la braderie de Lille (mais quotidienne!), des appels à la prière dans les oreilles, parfois perturbés par le bruit des mouettes. Négocier les prix, refuser 50 sollicitations, entrer dans Topkapi, l'ancien palais des sultans, marcher du côté de Galata. 15 à 20 kilomètres tous les jours, sans broncher : les enfants sont d'une facilité déconcertante. Et nous, heureux, vivants, chanceux.

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !
Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !
Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !
Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

Le retour en France est un peu chaotique. Le premier avion est en retard, nous arrivons à Belgrade tandis que notre vol pour Paris s'est déjà fait la malle. Nous nous retrouvons bloqués dans la capitale serbe, avec des informations peu nombreuses : un vol demain, il y a de la place ? « Attendez, je reviens vers vous ». On dort où ? « Attendez, je reviens vers vous ». Les enfants ont faim. « Attendez, je reviens vers vous ». Deux heures, assis à côté d'un guichet, c'est long dans ces moments-là. Finalement, nous resterons la nuit dans un hôtel de Belgrade, avant un réveil aux aurores (3h30 les cochons!) pour pouvoir rentrer. Depuis, j'essaie de me faire rembourser les tickets de la SNCF pris à la dernière minute (oh les prix de cochons ! Et ils annoncent 900 millions de bénéfices le lendemain ces salauds-là!).

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

Le bilan ? Une vraie surprise. Une Turquie immensément riche (notamment en lieux archéologiques) et diversifiée (paysages méditerranéens, semi-arides, forestiers, ruraux et verts), avec des habitants très souriants, régulièrement prêts à nous dépanner. En 3 semaines, nous n'avons vu que la moitié ouest, et sans vraiment chômer, ce qui laisse entrevoir l'immensité du pays.

Safranbolu, la Mer Noire, c'est Byzance !

PS : je ne me suis pas fait brosser les sandales.

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27 juillet 2022 3 27 /07 /juillet /2022 07:36

La côte méditerranéenne est quelque peu différente de la côte égéenne : plus nature, moins bétonnée. Plus chaude aussi ; nous atteignons régulièrement les 40°C. Ce n'est pas une surprise, et les litres d'eau défilent (ainsi que les bouteilles en plastique...). Pour nous rafraîchir, il y a également la solution de la plage. Oludéniz serait l'une des plus belles du pays, allez, allons-y !

Une heure plus tard, les bouchons ont eu raison de ma motivation. Le lieu est gavé de monde comme disent les Bordelais, et si la baie est peut-être belle hors-saison, c'est un endroit à éviter en ce moment !

Pas grave, Faralya nous accueille quelques kilomètres plus loin et nous offre un des plus beaux couchers de soleil du voyage.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Nous découvrons aussi la baie de Kekova et la plage d'Adrasan. La Turquie bénéfice d'un immense littoral, elle regorge de plages, de baies, de lieux cachés à côté de la mer. Une chance pour nous.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

La côte sud est également assez riche en patrimoine grec antique : Tlos et ses maisons troglodytes, Lethoon, Xanthos... Mais le must est Arycanda. Un endroit paumé, déserté, et magnifique : au milieu des montagnes (omniprésentes dans le pays), une ancienne cité lycienne abandonnée au IXème siècle. Depuis, la nature a repris ses droits et un arbre pousse au milieu du théâtre. Seuls, nous en profitons pour jouer la comédie.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Quelques kilomètres plus loin, un endroit fascinant, Chimaera. Vous connaissez peut-être la Chimère, ce dragon mythique enfermé par le fils de Poséidon. Cette histoire aurait pour origine ce site étonnant, où les flammes surgissent constamment du sol. La raison serait un surplus de méthane dont les émanations offrent un haut lieu de barbecue pour la population !

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Après Bodrum, nous découvrons la seconde grande ville touristique, Antalya. Centre-ville charmant, même si un meeting d'Erdogan nous oblige à marcher quelques kilomètres avec nos sacs sur le dos. Nous continuons rapidement notre route, enchaînant les théâtres antiques, comme à Pergé, et, le plus beau que nous ayons vu, à Aspendos.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Alanya est notre dernière ville de la côte méditerranéenne. Un endroit ultra-touristique où nous ne devions avoir que peu de souvenirs. Sauf qu'avant minuit, le sol en a décidé autrement. L'hôtel est calme, les enfants dorment, je compte faire de même. Tout d'un coup, le lit bouge. Étrange sensation, l'impression que l'ensemble de l'immeuble fait de même. Ce n'est pas une impression. Elle a ressentit la même chose. Cela dure 5 secondes. Assez pour comprendre. Tremblement de terre.

La Turquie connaît régulièrement des séismes. Une dizaine ont été ressentis depuis le début de l'année. Rien de très grave, les gens n'en parlent même pas le lendemain matin. Il faut dire que 4 sur l'échelle de Richter, c'est très peu ici. Pour nous, c'est différent, c'était notre premier ! Car dans le Nord, nous en ressentirons un deuxième, à 4,1, du côté de Safranbolu. Un peu plus long, et tout aussi étrange.

 

Nous quittons la côte, prêts à traverser le pays du sud au nord. J'imaginais des zones assez désertiques, des steppes arides, je découvre un pays alternant zones montagneuse et agricole. L'objectif est la Cappadoce, zone qui me fait rêver depuis de nombreuses années. A quelques kilomètres, nous en profitons pour voir un caravansérail, celui de Sultanhani, construit au XIIIème siècle par les Seldjoukides. Ici transitait le commerce entre l'Europe et l'Asie, cette fameuse route de la Soie où les chameaux et dromadaires permettaient les aller-retours. Les caravansérails sont construits à une trentaine de kilomètres les uns des autres, soit la durée d'un voyage d'une journée effectuée à cette époque. De notre côté, c'est 500 bornes de plus au compteur pour découvrir Uchisar, Göreme (à fuir) et Cavusin.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Cette Cappadoce n'est pas facile à décrire, les photos parlant déjà d'elles-mêmes. Nous sommes sur un plateau à plus de 1 000 mètres d'altitude. L'endroit est très touristique, mais il suffit souvent de marcher quelques dizaines de mètres pour être tranquille tant l'étendue du lieu est immense. Partout où nous regardons s'offrent à nous des cônes, ces fameuses cheminées de fée, laissées là par des vieilles éruptions et le travail du temps (et surtout l'érosion). La luminosité y est parfois aveuglante. Le lieu est aussi connu pour être un des hauts lieux du christianisme, dès les premiers siècles (présence de Saint Paul sur place?), tandis que les peintures des IX et Xème siècles restent fascinantes. Un petit air de Météores, dans un autre style.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce

Un petit peu plus de deux semaines se sont écoulées, il en reste une. Direction la mer Noire puis Byzance Constantinople Istanbul.

Une semaine turque : flammes, tremblements de terre et Cappadoce
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26 juillet 2022 2 26 /07 /juillet /2022 08:36

Nous sommes 5. Elle, moi, et mes trois demi-enfants (pour simplifier). Et l'idée incongrue d'effectuer un road-trip en Turquie n'est pas tout à fait mienne. C'est Elle qui était motivée, c'est Elle qui m'a motivé. 3 semaines devant nous, une Fiat avec 500 km au compteur, de la crème solaire, casquettes et chapeau, et l'envie d'en découdre avec un pays que je connais finalement très peu (mon seul passage remonte à 2009, et il a duré 2 jours d'un tour d'Europe très riche).

 

Après avoir longé la mer de Marmara depuis l'aéroport d'Istanbul, nous traversons le détroit des Dardanelles, haut-lieu d'une déroute franco-britannique pendant la première guerre mondiale (merci Churchill!). Peu de trace visible de cet épisode (je n'ai pas vu de cimetières militaires par exemple, mais peut-être n'étions nous pas sur la bonne zone), et ce qui nous marque est plutôt le nouveau pont (inauguré en 2023... oui, la section centrale fait 2023 mètres, et il n'est pas encore tout à fait terminé!). Un symbole, un passage entre l'Europe et l'Asie. Les paysages sont méditerranéens, les champs d'oliviers et de tournesols se succèdent, tandis que nous arrivons sur la côte égéenne.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

Troie est un mythe. Homère y est pour beaucoup, Henri Schliemann, l'archéologue découvreur des lieux, n'aide pas, et nous nous retrouvons sur un site antique riche (10 strates d'occupation) mais sans la réelle certitude d'être à Troie ! (le nom de la ville n'a pas encore été retrouvé lors des fouilles!) Alors nous regardons ce cheval reconstitué en pensant à cette belle Hélène qui aurait fait basculer toute la région dans une guerre homérique, puis visitons un très bon musée consacré à la recherche archéologique sur l'ensemble de la côte.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

A Pergame (Bergama de nos jours), pas de doute, la ville est bien là ! Ce royaume antique, qui succède à Athènes en tant que grande puissance de la région au IIIème siècle avant J-C, est connu pour son invention du parchemin et le fait d'être un temps la capitale de la province d'Asie de l'empire romain. Superbe théâtre à flanc de colline, et beau site archéologique.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

Quant à Ephèse... Le site est clairement exceptionnel, et il se partage : il faut arriver tôt, si vous ne voulez pas être emporté par un flot de croisiéristes américains ! Nous avons un peu de chance, nous visitons le théâtre et la bibliothèque avant leur arrivée. Le décor est somptueux, tout comme les maisons en terrasses, qui nous rappellent Pompéi. Juste à côté, la ville de Selçuk est agréable. On y trouvait à l'époque le temple d'Artémis, l'une des sept merveilles du monde antique (il ne reste honnêtement plus rien d'intéressant) mais aussi la basilique Saint-Jean : l'apôtre serait mort à Ephèse, tout comme Marie, la mère de Jésus, qui l'aurait accompagné jusque là (on reste au conditionnel). Selçuk est aussi la ville des... cigognes ! J'ignorais leur présente (massive) dans cette zone de Turquie !

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque
De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

Où dormir ? Chaque soir, la question se pose. Rien n'est réservé, rien n'est planifié, on avance au rythme des visites et, sans Internet et sans GPS, la recherche est parfois mouvementée (« c'est l'aventure »!). Nous sommes 5, et nous alternons entre 1 et 2 chambres, selon les disponibilités. Les hôteliers sont parfois surpris de nous voir ; « vous avez une réservation ? » étant régulièrement la première phrase entendue, et leur regard est encore plus interloqué quand ils voient les trois enfants. On voyage en mode « le monde d'avant internet », quoique... quand je sors ma boussole, c'est plutôt le monde d'avant avant avant avant internet ! L'offre est pléthorique, notamment dans les villes balnéaires, ici à Kusadasi ou ensuite à Bodrum.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

On y traîne assez peu la journée, et repartons dans la campagne, découvrir le parc de Dilek et la péninsule de Datça. Des lieux merveilleux et encore assez calmes. Randonnée, baignade, eaux cristallines, pique-nique sur la plage, programme validé par l'ensemble de la tribu.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

Après 5 jours à longer cette belle mer Egée, nous plongeons dans les terres, direction le diptyque Hiérapolis/Pamukkale. Un site original, combinant à la fois une curiosité naturelle et un site archéologique. Le second est déserté des touristes lors de notre présence, nous permettant de traverser cimetière (1 200 tombes!), aqueduc et théâtre en toute sérénité.

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque
De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

Quant au site naturel de Pamukkale, c'est dingue et c'est blindé. La foule est concentrée autour de l'entrée, il suffit de marcher 250 mètres pour s'en éloigner. Qu'est-ce que ce « château de coton » ? Des sources d'eau chaude (entre 35 et 55°C) déversant du sel calcaire depuis des milliers d'années. Cela a créé des bassins en cascade. C'est fou ! L'eau a une couleur incroyable et le site était déjà visité par... les Romains ! (ce qui explique Hiérapolis juste à côté).

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque
De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque

La première semaine aura été rythmée, avec 1 500 bornes au compteur et un bon aperçu de la Grèce antique... euh, de la Turquie. Les enfants apprécient les visites, et de se baigner tous les jours (étonnant, non ?). Et, ce qui est chouette, c'est qu'il nous reste encore deux semaines !

De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque
De Troie à Pamukkale, une Turquie très grecque
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4 juillet 2022 1 04 /07 /juillet /2022 19:48

A quoi bon ? Cela faisait plusieurs années, et, honnêtement, une partie de moi n'y croyait plus. Retomber amoureux, être aimé en retour. C'était fini, c'était passé, c'était illusoire. Je regardais quelques histoires avec envie, mais le plus souvent avec amertume. Les statistiques étaient formelles : un mariage sur deux se finit en divorce, et le mariage qui tient est rarement un exemple de bonheur continu. Alors à quoi bon ? A quoi bon les sacrifices de la relation à distance ? A quoi bon ouvrir son cœur pour le retrouver quelques mois/années plus tard en cinquante morceaux ? A quoi bon même essayer ? A quoi bon parler à cette fille, alors que ça ne mènera à rien.

 

Ce qui est bien avec toi, c'est que je n'ai pas trop eu le choix. Tu m'as parlé, et tu ne m'as pas lâché. Oh, oui, tu ne l'assumes peut-être pas, mais j'ai 100 témoins, à savoir toutes celles et ceux qui étaient là, ce soir-là, à la soirée d'au revoir de Fanny et Julien. Depuis, les deux sont partis à la Réunion, ont enfanté, et sont aujourd'hui sur le chemin du retour. Et toi, à mes côtés.

 

Diable, comment en sommes-nous arrivés-là ? Nous étions si différents. Je dormais sur ce canapé lillois, sans emploi, sans envie ; tu avais un divorce, 3 apparts et demi, et, car c'est important, 3 enfants. Chance de réussite : 0,1%. Et nous voici aujourd'hui dans notre maison [enfin, surtout moi, car tu n'es pas souvent là!]

Pour réussir, il a fallu briser de nombreuses barrières mentales. Moi le premier. Une mère, des enfants. Au départ, je n'étais pas prêt. D'ailleurs, j'ai reculé. Je t'appréciais beaucoup, mais la barrière mentale était là, très haute. Alors nous avons commencé avec une amitié. Pas facile, une amitié, quand il y a une attraction. Pas facile, une amitié, quand il y a une si bonne entente. Pas facile, une amitié, quand il y a une telle fluidité.

Il a fallu un confinement pour remettre cette situation en question. La suite, pas besoin d'en dire plus.

 

Pourquoi ça marche ? Pourquoi nous ? Pourquoi toi ? Oh, c'est une évidence. Le mot est fort, et l'émotion qu'il me procure est palpable lorsque je frappe les touches de mon clavier. L'évidence, ce que je recherchais depuis tant d'années. Elle est là, c'est toi. Tu me fais rire Chloé. Vraiment. Alors oui, certes, parfois à ton insu. Oui, je me moque régulièrement de toi, car qui aime bien châtie bien, et je t'aime beaucoup (et je suis aussi un gros relou). Nous partageons énormément. Nous discutons, nous échangeons, nous débattons. Sans forcément parvenir toujours aux mêmes opinions. Et c'est aussi ça qui est génial. Accepter l'autre telle qu'elle est, avec ses nombreuses qualités et ses petits défauts (à quoi bon ranger sa carte bancaire!?!)

 

Tu es vivante. Je veux dire, tu es pleine de vie. Un ouragan, une tornade. Quand tu es dans la pièce, j'ai l'impression qu'elle bouge. Tu as plein de projets. Tu veux inviter la terre entière. Tu aimes la musique à fond, et te réveiller très tôt pour croquer la journée. Moi, j'ai souvent tendance à être assez calme, j'aime dormir, et lire trois heures le journal. Tu es le feu, je suis la glace. Tu t'emportes, tu t'impatientes, je reste calme. Tu es pleine d'émotions. Et les miennes reviennent, grâce à toi.

 

Je ne dis pas que j'ai un cœur de pierre. Disons qu'il était justement glacé. Tu le fais fondre. J'ai des larmes qui remontent à mes yeux parfois, quand je te parle de moi, et de mes sentiments. J'ai envie de pleurer Chloé, j'ai envie de pleurer tellement je suis heureux d'être avec toi, de t'avoir rencontrée, que l'on se soit laissé une chance. Et ce, malgré mon discours défaitiste du départ, te promettant d'aller, ensemble, droit dans un mur. Car nous n'étions pas faits pour être ensemble, nous n'étions pas au même point dans notre vie, nous étions si différents. Et, finalement, la vie m'a donné tort, une fois de plus.

 

Alors je crois à nouveau. Je m'engage à nouveau. Un achat ensemble, d'une maison. Un rôle de beau-papa, « demi-papa » comme ils disent, qui, finalement, me convient bien. Et des projets plein la tête, plein nos têtes. On partira peut-être un jour à l'aventure de l'autre côté de la planète, on se lancera peut-être ensemble dans des pérégrinations politiques ou littéraires, on agrandira peut-être un jour notre famille. Car tout est possible, quand on s'aime.

 

Je t'ai cherché. Je t'ai attendu. Tu m'as manqué. Amour. Merci d'être là.

 

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29 juin 2022 3 29 /06 /juin /2022 14:22

Quelle est mon envie ? Que veux-je faire ? Que vais-je faire ? Pendant plusieurs semaines, ce fut la course. Finir la campagne de Jadot. Finir le livre sur Houlle. Finir les cours. Finir les travaux. Faire un déménagement. Déballer les cartons. Et là, aujourd'hui, je m'arrête. Je me pose sur mon canapé, sans télé, sans connexion internet, juste moi, et du temps disponible. Et je ne sais pas quoi faire. Comme si j'avais perdu l'habitude !

 

La période fut dense. Et constructive. J'en ressors avec une nouvelle expérience professionnelle qui a permis d'assouvir ma soif de curiosité sur la politique nationale. J'en ressors avec un second ouvrage qui me rend fier, tout en donnant le sourire à des gens que je ne connaissais pas lorsqu'ils reçoivent de mes mains le livre sur l'histoire de leur village, ou celui de leurs parents. J'ai, en l'espace d'un mois et demi, noué des liens avec des élèves formidables à Calais. Et, aujourd'hui, je vous écris depuis chez moi. Ma maison. Littéralement. Car je suis devenu propriétaire.

 

Quand on repense à ma situation il y a deux ans et demi : célibataire, revenant d'Amérique du Sud, dormant sur un canapé à Lille... ça passe vite ! Et me voilà entré dans un monde qui me faisait sourire il y a quelques années : celui des taux négociés avec un banquier et des travaux dans sa demeure. Poncer un parquet. Une bordureuse. Fibre de verre. Branchement électrique. Changer un robinet. Autant de choses que j'avais jamais faites jusque là, un vocabulaire qui m'était étranger, et qui me permettait souvent de dire que « je ne suis pas très manuel ». En vérité, je n'avais jamais essayé. Et, au final, ce n'est pas toujours très compliqué. Un tuto, un conseil, et des essais (parfois nombreux) pour un résultat plutôt correct (quoi que la fibre de verre ne me satisfait pas complètement).

Bien sûr, il reste encore du travail. Quand je vois cette maison, ma maison... enfin, notre maison (!), je vois des choses à faire dans chaque pièce. Et je pense que j'en ai pour l'année. Sauf que là, j'en ai plein le dos. Deux semaines et demi à faire les travaux, à porter des cartons, un week-end de déménagement, des aller-retour à Emmaüs, à la déchetterie... je n'ai plus l'envie de m'y remettre. J'ai mal partout, je suis fatigué. Une journée de repos. Mais comment la vivre ? Comment s'arrêter brusquement lorsque l'on vit à 100 à l'heure ? Le choc est rude. Je regarde par la fenêtre. Je me dis d'aller faire du sport, un peu de vélo. Mais j'ai mal partout je vous dis ! Dormir. Manger. Lire. Triptyque d'un retraité. Et, aussi, regarder par la fenêtre. Cette école de musique, ce sera ma vue pendant plusieurs années. Je l'aime bien. Des arbres, du calme, des oiseaux qui chantent, des lycéens qui stressent pour leur grand oral. On y sera bien.

 

Venez, vous êtes les bienvenu.e.s.

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