C'est seulement ma seconde filmographie française, après celle de Jacques Audiard. A croire que je me suis spécialisé dans le cinéma US ! Mais je vais essayer de rattraper ça ces prochaines semaines/mois.
Henri Verneuil. Pour être honnête, je ne connaissais pas ce type il y a quatre ans. Et pourtant... il a tourné avec les plus grands : Fernandel, Gabin, Belmondo, Delon, Montand... et Michel Audiard aux dialogues !
Le boulanger de Valorgue (1953) : 13,5/20. Avec Fernandel.
Un boulanger d'un petit village du sud-est de la France, au caractère bien trempé. Son fils part faire son service militaire en Algérie. Quelques mois plus tard, la fille de la voisine débarque d'Italie avec un enfant sous le bras. Elle dit qu'il est de Justin, le fils du boulanger. Mais le boulanger ne l'accepte pas, quitte à refuser de servir tous ceux qui sont contre lui. Une « guerre » éclate dans le village.
Film d'époque, que j'ai plus apprécié pour son côté historique que pour son scénario. La question de l'immigration italienne, du couple, du mariage, de la religion... mais aussi l'isolement d'un petit village, sa vie, la dépendance à ces commerces. On est bien avant la démocratisation de la voiture, ou du téléviseur. Alors le rythme de vie a bien changé. Fernandel est très bon dans son rôle de têtu.
L'un des premiers grands films de Verneuil.
La vache et le prisonnier (1959) : 15/20. Avec Fernandel
En 1943, Charles Bailly (Fernandel), prisonnier de guerre en Allemagne, décide de s'évader de la ferme où il est employé. Sa ruse, grossière et folle en apparence, consiste à traverser le pays, la vache Marguerite en laisse et un seau de lait dans l'autre main. Ainsi va commencer la plus extraordinaire des odyssées pour l'homme et la bête, paisible image de paix dans un pays déchiré par les haines et la violence. Après s'être séparé de l'animal, non sans lui avoir promis de ne plus jamais "manger de veau"... dissimulé sous un train, il franchit la frontière germano-française et se retrouve à la gare de Lunéville où, prenant la fuite devant deux policiers français, il sautera dans un train en partance pour... l'Allemagne. Ce n'est que deux ans plus tard que cet héroïque anti-héros reviendra, "comme tout le monde", de captivité.
Fernandel est d’un touchant impressionnant. Une pensée pour la scène finale. Près de 9 millions de spectateurs.
Le président (1961) : 14/20. Avec Jean Gabin et Bernard Blier.
Emile Beauford était un président du conseil. Aujourd'hui à la retraite, il passe ses journées à écrire ses mémoires. Il se souvient alors de l'épisode de la dévaluation du franc et du jour de son renvoi. Avec un personnage en commun : Philippe Chalamont, qu'on annonce aujourd'hui comme président du conseil.
Film politique, porté par Gabin. C'est fou comme le film est d'actualité (le passage sur l'Europe est fantastique). Corruption, petits arrangements entre amis, servir les intérêts des puissants plutôt que ceux de la nation... un film qui n'a pas pris une ride.
Quelques citations (les dialogues sont de Michel Audiard...alors forcément!) :
C'est toujours les mêmes qu'on cite, pas étonnant qu'ils soient connus.
Je suis un mélange d'anarchiste et de conservateur, dans des proportions qui restent à déterminer.
Le repos, c'est fait pour les jeunes : ils ont toute la vie devant eux. Moi pas.
C'est une habitude bien française que de confier un mandat aux gens et de leur contester le droit d'en user.
Il faut prendre la démocratie comme elle est, cette démocratie dont un grand homme a dit qu'elle était le pire des régimes, à l'exception bien entendu de tous les autres.
On est gouvernés par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui seraient seulement pas foutus de faire pousser des radis.
« Il y a des patrons de gauche ! Je tiens à vous l'apprendre !
Oui, et y'a aussi des poissons volants mais qui ne constituent pas la majorité du genre ! »
Un singe en hiver (1962) : 18/20. Avec Jean Gabin et Jean-Paul Belmondo
Tiré du livre éponyme d’Antoine Blondin, ce film met en scène juin 1944, Albert Quentin (Jean Gabin), ancien fusilier-marin en Chine, tient, avec sa femme Suzanne, rencontrée à La Bourboule, l’hôtel Stella dans le village de Tigreville, sur la côte normande aux environs de Deauville.
Il se laisse souvent aller à trop boire, ce qui le porte à la nostalgie de son service militaire en Chine. Lors d’un bombardement en juin 1944, il promet à Suzanne de ne plus boire si l’hôtel échappe à la destruction ; promesse tenue.
Quinze ans plus tard, débarque Gabriel Fouquet (Jean-Paul Belmondo), publicitaire. Il boit pour effacer l’échec de sa vie sentimentale avec Claire qui vit à Madrid. Il vient voir sa fille Marie pensionnaire à Tigreville, dont Mme Victoria, la directrice pourtant française ne parle qu'en anglais. Les deux hommes vont connaître deux jours d’évasion grâce à l’ivresse, l’un en Espagne et l’autre en Chine ; l’apothéose étant un feu d’artifice « dantesque » sur la plage. Puis chacun retournera à sa vie d’avant.
Le jeu des deux acteurs est très bon, star du cinéma français et vedette de la Nouvelle Vague.
Citations (bonjour Audiard) :
Ah ! Nous y voilà ! Ma bonne Suzanne, tu viens de commettre ton premier faux pas ! Y a des femmes qui révèlent à leur mari toute une vie d'infidélité, mais toi, tu viens de m'avouer 15 années de soupçon. C'est pire ! Eh bien que t'as peut-être raison : qui a bu boira ! Ça faut reconnaître qu'on a le proverbe contre nous.
Les gastronomes disent que c'est une maison de passe et les vicelards un restaurant chinois.
Dis-toi bien que si quelque chose devait me manquer, ce ne serait plus le vin, ce serait l'ivresse !
Monsieur Esnault, si la connerie n'est pas remboursée par les assurances sociales, vous finirez sur la paille !
Je ne vous apprendrai rien en vous rappelant que Huang Ho veut dire fleuve jaune et Yang-tsé-Kiang fleuve bleu. Je ne sais pas si vous vous rendez compte de l'aspect grandiose du mélange. Un fleuve vert ! Vert comme les forêts, comme l'espérance. Matelot Esnault, nous allons repeindre l'Asie, lui donner une couleur tendre. Nous allons installer le printemps dans ce pays de merde.
Suzanne : Albert, j'ai peur !
Albert : Bois !
Suzanne : Avoue que c'est quand même une drôle d'heure pour arriver, surtout de ce temps-là !
Albert : Ah ! Les voyageurs c'est fait pour voyager, le temps n'a rien à voir là-dedans !
Albert : Pourquoi buvez-vous ?
Gabriel : La question m'a déjà été posée Monsieur le Proviseur !
Albert : Probablement par des gens qui vous aiment bien !
Gabriel : Probablement… Claire me la posait trois fois par semaine. Elle devait m'adorer.
Albert : Écoute, ma bonne Suzanne, t'es une épouse modèle.
Suzanne : Mof !
Albert : Mais si, t'as que des qualités. Et physiquement, t'es restée comme je pouvais l'espérer. C'est le bonheur rangé dans une armoire. Et tu vois, même si c'était à refaire, eh bien je crois que je t'épouserais de nouveau. Mais tu m'emmerdes.
Suzanne : Albert !
Albert : Tu m'emmerdes gentiment, affectueusement, avec amour ! Mais tu m'emmerdes !
Mélodie en sous-sol (1963) : 14/20. Avec Jean Gabin et Alain Delon
Dialogue d'Audiard.
Charles (Jean Gabin), la soixantaine, tout juste sorti de prison, ne se fait plus tout jeune. Il retrouve difficilement son pavillon à Sarcelles.
Son épouse Ginette lui propose de déménager dans le Sud, de prendre un commerce et de couler des jours heureux, mais Charles ne conçoit qu'un seul genre de retraite : dorée et au soleil, en Australie. Pour cela, il doit faire un autre coup, le dernier, celui « d'une vie » et cette fois ce sera la bonne : le casino de Cannes. Tout est prêt. Il contacte alors un jeune malfrat rencontré en prison, Francis Verlot (Alain Delon).
La scène de la fin, avec l’argent dans la piscine et le regard de Gabin, est grandiose.
Week-end à Zuydcoote (1964) : 17/20. Avec Jean-Paul Belmondo, Jean-Pierre Marielle, François Perier et Pierre Mondy, Chaterine Spaak.
Dunkerque, 1940. La plage, le bout du front. Les hommes sont prisonniers de cet enfer. Les avions allemands passent et repassent. Les soldats anglais se font évacués. Les Français essaient. Surtout Julien, qui veut aller de l’autre côté.
Très bon film de par son côté réaliste. Il n’y a pas de héros. Il n’y a pas de grande action. Enfin, il y en a une, mais elle est rapidement ternie. Le reste, c’est une routine de guerre, de survivance. Belmondo est très sobre, ce qui n’est pas toujours le cas. Un excellent film sur l’opération dynamo, vue par les Français.
Le clan des Siciliens (1969) : 14/20. Avec Jean Gabin, Alain Delon et Lino Ventura.
Pas le meilleur Verneuil mais un bon film d’action. Porté par des grands acteurs.
Roger Sartet (Alain Delon), un truand, s'évade avec la complicité d'une famille mafieuse, les Manalese, dirigée par le patriarche Vittorio (Jean Gabin). Malgré une traque menée par le commissaire Le Goff (Lino Ventura), Sartet lui échappe. Avec ses complices le truand propose un projet démentiel : voler une collection de bijoux qui doit être transférée de Rome vers New York par avion. Vittorio fait appel à son vieil ami italien installé aux États-Unis pour l'aider dans le coup...
Peur sur la ville (1975) : 13,5/20. Avec Jean-Paul Belmondo et Charles Denner.
Le commissaire Letellier a vu sa carrière brisée par le truand Marcucci, à l'issue d'un braquage qui a mal tourné. Muté dans un commissariat terne, il continue à chercher la trace de son ennemi. Au moment où Letellier apprend enfin le retour du braqueur à Paris, un mystérieux tueur terrorise la capitale. Letellier doit alors choisir entre assouvir sa vengeance ou faire son métier de policier et neutraliser un redoutable tueur en série.
Pas le meilleur Verneuil, sans grande surprise. Merli dans le rôle de Minos tient bien son personnage.
I comme Icare (1979) : 16/20. Avec Yves Montand
Un très bon film français, thriller politique. Yves Montand est très bon. Une préférence pour la scène de l'expérience médicale.
Un peu de Kennedy en arrière-fond, je ne sais pas pourquoi mais ça revenait en filigrane.
À la suite de l'assassinat du Président Marc Jarry récemment réélu, une commission d'enquête dirigée par le président de la Haute Cour de Justice, Frédéric Heiniger, est instituée afin d'élucider les circonstances de l'attentat. Le rapport final de cette commission précise qu'il n'y a eu qu'un seul tireur, Karl-Erich Daslow, ayant agi seul, par folie et avec préméditation. Ces conclusions ne satisfont pas le procureur Henri Volney, à qui sont remis les pleins pouvoirs afin de continuer l'enquête.
Le film s'appuie sur l'allégorie d'Icare : à vouloir trop s'approcher de la vérité, on se brûle les ailes.
Mille millards de dollars (1982) : 13/20. Avec Patrick Dewaere, Charles Denner.
Paul Kerjean, journaliste, reçoit un coup de fil anonyme lui recommandant d'enquêter sur Jacques Benoit-Lambert, riche industriel et homme politique à l'avenir radieux. Très vite, il voit le scandale. Mais après son article, les événements s'enchaînent, et il se rend compte qu'il a été piégé.
Film assez surprenant, très anti-capitaliste, anti-libéraliste. Un film dans l'air du temps, qui pourrait avoir été tourné cette année. Patrick Dewaere est assez bon, mais le rythme du film ne l'aide pas. Les flash-back ralentissent un peu. Il manque un truc, une ferveur, quelque chose. Dommage car le scénario est costaud.
Ce brave Verneuil m'aura bien plu.
Mon classement des réalisateurs (totalement subjectif)
1. Emir Kusturica : 17,08/20 (7 films)
2. David Fincher : 16,28 (9 films)
3. Albert Dupontel : 15,83/20 (6 films)
-. Alejandro González Iñárritu : 15,83 (6 films)
5. Frank Capra : 15,50 (7 films)
6. Billy Wilder : 15,46 (12 films)
7. Charlie Chaplin : 15,29 (7 films)
8. Clint Eastwood : 15,25 (10 films)
9. Xavier Dolan : 15,2 (5 films)
10. Quentin Tarantino : 15,19 (8 films)
11. Les frères Coen : 14,96 (14 films)
12. Stanley Kubrick : 14,82 (11 films)
13. Henri Verneuil : 14,80 (10 films)
14. Sergio Leone : 14,58 (6 films)
15. Jacques Audiard : 14,5/20 (7 films)
16. Howard Hawks : 14,29 (7 films)
17. Alfred Hitchcock : 14,21 (12 films)
18. George Cukor : 13,95 (10 films)
19. Dany Boon : 13,88 (4 films)
20. Pedro Almodovar : 13,86 (11 films)
21. Steven Spielberg : 13,79 (12 films)
22. Stephen Daldry : 13,75 (4 films)
23. Woody Allen : 13,55 (19 films)
24. Tim Burton : 13,25 (12 films)
25. Wes Anderson : 13 (7 films)
26. Sofia Coppola : 12,9 (5 films)
27. Gus Van Sant : 11,5 (11 films)