L’important, c’est de ne pas s’arrêter. Regarder le passé, m’en délecter, relire ou revivre, c’est une chose que je pourrai faire à la retraite, avec mes (nombreux) petits-enfants. C’est déjà une chose que je fais au jour le jour quand je réponds aux questions de tous ceux qui ont suivi mes écrits et mes photos au cours de ces derniers mois. Et c’est quelque chose que je fais d’une autre façon, mais j’y reviendrai.
Toujours est-il qu’il faut que j’aie de nouveaux objectifs, de nouvelles ambitions. On m’a déjà critiqué par rapport à ce manque d’ambition, il faut donc que je fasse taire les mauvaises langues. Non, je ne ferai pas rien de mes prochains mois, de mes prochaines années. L’emploi du temps est même plutôt chargé. L’information numéro un est bien sûr le doctorat, la thèse, avec un directeur que j’ai fini par trouver après un bon mois et demi de recherches. En fait, j’en ai deux, un sur Bordeaux et l’autre rattaché à Pau, mais qui séjourne pour deux ans au Kenya. Les deux sont reliés au même centre de recherche, le LAm (Les Afriques dans le monde). Moi qui ai depuis quelques années maintenant l’Afrique au cœur de mes recherches universitaires, c’était une obligation d’être rattaché à un centre qui se concentre sur le même continent. Il y en a deux en France, et j’atterris finalement dans le sud-ouest. Après avoir obtenu l’accord de mon professeur, je viens de prendre connaissance des démarches administratives à accomplir. Reste la question du financement, souvent problématique quand on réalise une thèse dans les sciences sociales, et la définition de mon sujet. Ce devrait être sur les conséquences du génocide rwandais sur les relations régionales et internationales au sein de l’Afrique subsaharienne, sujet passionnant (je vous promets !).
Cela fait maintenant deux ans que je suis sorti du système universitaire, du système scolaire (un an officiellement, mais ne jouons pas sur les mots). J’avoue avoir un peu de doutes concernant mon retour entre les murs, à écouter un professeur ou à effectuer des recherches sur mon sujet. Non pas que je pense ne pas être prêt. Je le suis. J’ai attendu deux ans pour être sûr de ma motivation, et je l’ai gardée. Je n’ai pas peur non plus vis-à-vis de mes capacités. J’ai plutôt réussi mon dernier mémoire et je suis sorti tout auréolé d’une mention très bien à mon Master. Mais j’ai peur des sacrifices que cette nouvelle aventure va engendrer.
Que voulez-vous, à chaque aventure son lot de sacrifices. C’est peut-être l’une des définitions de la vie. On ne peut rien faire sans sacrifice. Cette thèse risque d’entraîner beaucoup de sacrifices sur le plan personnel, sur le plan des relations humaines. Déjà, je vais me retrouver dans le sud-ouest, et je serai seul là-bas. Famille, ami(e)s, tous dans un Nord très lointain (et très pluvieux, ça compense un peu !). Et puis Elle, qui va commencer l’université dans un autre nord, celui de l’Allemagne. Dans ces conditions, vous imaginez un peu les difficultés qui vont se poser devant nous. Qui vivra verra, nous avons tout l’été pour nous, et pour réfléchir aux questions qui se poseront sans doute sur l’organisation de notre relation.
Un autre sacrifice, qui vous paraît peut-être plus futile, est celui de mon temps libre. Voilà deux ans que je bénéficie d’un temps pour moi. Je possédais le temps, autant que celui-ci me possédait. J’étais libre de faire ce que je voulais, je regardais des films en pagaille, je lisais abondamment. Je sortais beaucoup, je voyageais encore plus. J’allais à la rencontre du monde, et je vais maintenant me cloisonner, m’enfermer. J’aurai la tête aux recherches, j’utiliserai beaucoup de mon temps à cet effet. Et quid du reste ? Il me faudra faire des choix, des sacrifices. Si je privilégie l’Allemagne, je devrai sans doute peu voir le Nord de la France. L’inverse est vrai, le juste milieu est difficile à trouver. Si je lis beaucoup sur mon sujet, je lirai beaucoup moins sur d’autres, qui m’intéressent pourtant tout autant. Au-delà des études, de l’Allemagne, de la famille, des ami(e)s et des hobbies (cinématographique ou littéraire), j’aime aussi le sport. Je rêve de reprendre le foot. Je pense sérieusement à l’engagement politique. Et il y a des contrées que je souhaite visiter dès que du temps se libère.
Vous voyez, il y a tellement de choses que je souhaite faire. Et je n’évoque pas le livre que je rêve un jour d’écrire, et qui me demanderait peut-être de sacrifier l’ensemble des choses que j’ai citées. Mais je ne me plains pas. Au contraire, je me rends compte de la chance que j’ai. Avoir trop d’options, c’est mieux que pas assez. Avoir peu de temps, finalement, c’est un gage de réussite. Cela prouve qu’on l’utilise au maximum. Et même si j’apprécie parfois de m’ennuyer, il ne faudrait pas que cela soit ma vie. Sinon j’aurais l’impression de la rater. J’aurais l’impression de perdre mon temps. Alors avant d’aborder cette nouvelle aventure, je dois profiter, une nouvelle fois, d’un été où je suis libre. Les voyages, les ami(e)s, la famille, l’Allemagne, les hobbies, le football et même le bouquin, oui, je dois en profiter. Commençons.