C'était le milieu du mois d'août et j'avais décidé de rejoindre un projet que je trouvais particulièrement intéressant. Le projet Onfield. L'objectif est simple, clair, précis : récolter un cahier de doléances. Pour cela, c'est facile, il suffit d'écouter la population. De lui demander son avis. Direction le marché et la rue de Dunkerque. La politique, vous en pensez quoi ?
« Ché du brin ! » Avec l'accent de chez nous. « C'est de la merde », pour une petite dizaine de personnes. « Coupons leur la tête ! ». Les accents révolutionnaires étaient de mise, on demande « l'abolition des privilèges ».
Clairement j'ai été surpris. Je savais que les Français n'avaient pas confiance dans leurs politiques. Mais à ce point... Près de 90% des passants interrogés témoignèrent d'un réel mécontentement et d'une totale défiance à l'égard de nos représentants.
Certains trouveront peut-être cela normal, les nombreuses histoires politico-judicaires n'aidant pas à la confiance du peuple dans ses représentants. Mais ça fait chier ! Merde alors, c'est tout de même de notre démocratie que l'on parle. Si le peuple n'a plus aucune confiance dans ceux qu'ils envoient pour le représenter, pour prendre les décisions à sa place, c'est un ENORME problème.
Bien sûr j'en veux à nos représentants, tout au moins à ceux qui donnent le mauvais exemple. Mais j'en veux aussi à la population, aux citoyens. Pourquoi mettre tout le monde dans le même sac ? Pourquoi prendre un exemple précis (au hasard Cahuzac) et penser qu'ils sont tous pareils ? Dans un autre contexte, cette généralisation s’appellerait racisme.
Les Français, en tout cas ceux de Saint-Omer, font donc preuve d'un véritable racisme à l'égard d'une catégorie de la population : les hommes politiques.
Attention, quand on disait politique, les gens pensaient gouvernement (actuel ou ancien), députés, sénateurs. Quand on parlait du maire, le discours changeait, surtout si on parle d'un maire de petit village. Et pour cause, on le côtoie tous les jours. La confiance s'instaure. On l'aime bien notre maire.
C'est un peu comme l'Arabe du coin. Celui que l'on connaît depuis 20 ans, à qui l'on dit bonjour et qui nous répond poliment. Celui qui vient nous aider quand on a besoin d'un service. Il est sympa, hein. Mais ça n'empêche qu'avec tout(s) ce(ux) qu'on voit à la télé, on ne peut pas s'empêcher de dire qu'ils sont un problème.
L'expérience fut sympa dans l'ensemble. On rencontre du monde, on revoit des têtes, on entend la population. Mais on ne peut pas répondre. Nous n'étions pas là pour donner notre avis, mais pour écouter. Et ça peut parfois être frustrant. Par exemple, à chaque fois que l'on nous dit que seule Marine peut changer les choses, on se doit de sourire. Merci, et bonne journée.
Surtout, on en est revenu les mains vides de propositions pour changer les choses. Nos fameuses doléances. La population s'accorde pour dire qu'il y a un problème, mais personne ne semble avoir la solution. Certes, le concept n'était pas propice à de longues réflexions (on interrogeait les gens dans la rue), mais cela n'empêche : les citoyens n'ont pas d'idée pour résoudre le problème. En tout cas, pas dans ce contexte. Il faudrait peut-être le faire différemment, par écrit, sur internet. Mais là encore, je doute un peu. Il me semblait que les gens étaient résignés. Ou qu'ils s'en foutaient quasi-royalement, c'était selon.
En repensant à cette journée, je ne peux m'empêcher d'éprouver une certaine tristesse. Et beaucoup d'inquiétude concernant l'avenir.
Ça m'a cependant donné envie de persévérer, de me battre pour cette démocratie à laquelle je crois. Car on n'a pas encore trouvé mieux.