29 novembre 2010 1 29 /11 /novembre /2010 04:42

C'est hier que j'ai trouvé la dernière brique de ma maison, la dernière pièce de mon puzzle, la dernière note de ma chanson. Harlem l'insoumise m'a été révélée. Le Nick's club, dans la 149ème et St Nicholas. Un petit troquet qui ne paie pas de mine. Une fois à l'intérieur, une incroyable ferveur pour la musique. Le jazz résonne, et je suis au premier rang. Sans relâche, je suis les doigts des saxophonistes, empruntant la route du blues et du jazz. Une basse, un piano et la trompette. Les morceaux s'enchaînent, et les applaudissements suivent le rythme. Une ovation les accompagne bientôt.

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Harlem c'est une partie de Manhattan que l'on n'imagine pas forcément. Les gratte-ciel laissent place à des maisons de trois étages, occupées par une population parfois très pauvre : plus d'un tiers du quartier vit sous le seuil de pauvreté. Harlem c'est également une exception ethnique à Manhattan : hispaniques et noirs s'y côtoient alors que les blancs ont largement déserté. Je vis au nord-ouest du quartier, c'est plutôt Porto-Rico. Au centre de Harlem, c'est l'Afrique. Il y a même depuis quelques années un "Little Senegal". A l'est, on se balade en Amérique du Sud. Communautarisme, quand tu nous tiens.

Chaque partie a ses spécificités, assez différentes du reste de Manhattan. La plus importante est la religion. On compte près de 400 églises dans Harlem. C'est un des grands foyers du christianisme, les pasteurs ayant une influence considérable, parfois même politique. Dans le même temps, c'était le lieu de vie de Malcom X et le Nation of Islam respire encore malgré le 11 septembre.

 

Vous comprenez très vite : la spécificité d'Harlem correspond à cette mixité, ces mélanges, un véritable melting-pot à l'américaine, qui symbolise tout autant une ville qu'un pays. Avec quelques mauvais côtés parfois. La sirène des ambulances hurlant à la mort, de jour comme de nuit. Obésité et analphabétisme se côtoient, avec un mélange de pauvreté, pour donner un beau sentiment d'insécurité dont les fans du 13 heures de TF1 raffolent. Mais je retiens surtout les avantages. Les prix cassés comme nulle part ailleurs dans la grande pomme. Des dizaines de restaurants exotiques, du Cubain au bon vieil Américain, de l'Africain à  l'Argentin. Les cafés et les clubs de jazz, le Cotton Club ou l'Apollo Theater. La musique qui envoûte au coin des rues, sur des airs de salsa ou de gospel.

 

Harlem ca vit. De jour comme de nuit vous allez rencontrer des mecs prêts à causer, des restaurateurs prêts à cuisiner, quelques badauds tentant de vous vendre quelque chose qui est légal ou qui ne l'est pas. Parfois vous allez vous demander si les Espagnols n'ont pas envoyé ici leur Invincible Armada, qui résiste encore et toujours à l'envahisseur anglais et sa langue shakespearienne. Et vous allez respirer l'histoire du mouvement des droits civiques, en arpentant les rues Martin Luther King ou Adam Clayton Powell, où les descendants de Marcus Garvey font toujours flotter le drapeau pan-africain de l'UNIA.

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Je vais bientôt quitter Harlem. Mais Harlem ne me quittera pas. Un morceau de jazz et ses rues vont redéfiler. Un peu de blues et les visages je vais me remémorer. Un saxophone et la musique va chanter.

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