6 ans putain ! 6 ans ! Il y a six ans de cela, j'allais revenir après mon premier semestre Erasmus. Je vous parlais à l'époque d'un semestre de folie, de fête et de furie. Et Dieu sait que c'était le cas !
Car dans la vie, il y a ceux qui ont fait Erasmus, et il y a les autres. C'est facile, j'ai mes deux meilleurs copains, et ils ont tous les deux fait Erasmus. Il m'est d'ailleurs arrivé plusieurs fois de devenir pote, ou tout au moins de développer une relation avec quelqu'un, quand cette personne était en Erasmus. C'était comme si ce moment nous rapprochait, inconsciemment. J'avais l'impression de pouvoir comprendre cette personne, et cette personne en Erasmus avait l'impression de pouvoir être comprise. Car Erasmus c'est comme une secte : les fêtes d'initiation sont une folie sans nom, l'eau bénite a été remplacée par le litre de bière, Dieu est en fait le diable, plein de plaisirs et de vices. Erasmus, c'est la vie dans une bulle, une bulle d'étudiants qui sont seuls au milieu d'une ville européenne, sans passé, sans futur, avec pour seule bible le Carpe Diem.
6 ans, c'est bien pour faire un bilan. Un bilan de l'après-Erasmus.
Car oui, Erasmus est un rêve, une vision, un mirage. Et l'après-Erasmus fait sacrément mal au cul. Au cœur tout au moins. A la tête encore plus. Cette putain de dépression post-Erasmus. Vous riez. Normal, vous n'avez pas fait Erasmus. Car tout ceux qui ont fait Erasmus savent de quoi je veux parler. Entendre un accent étranger en ville et se retourner. Croiser un Erasmus à la fac et lui parler (jalousie quand tu nous tiens...). Et surtout, cette tonne d’anecdotes amassées au fil des soirées, et personne à qui les raconter. Cette superbe histoire d'une maison hantée, vide, et finalement habitée. J'ai beau la raconter à mes potes de Saint-Omer, ils n'auront pas la même réaction que ceux qui l'ont vécue. Ils n'y étaient pas. Frustration. Et toutes mes photos Erasmus... (3 660, si, si, j'vous jure !) Mon après-Erasmus, ce fut un an d'université sans réelle soirée. Avant d'y retrouver goût, petit à petit. A croire que j'avais fait une overdose. Que j'avais l'impression de les avoir toutes faites.
L'après-Erasmus, c'est aussi les retrouvailles. Car si Erasmus est une sacrée agence matrimoniale, c'est aussi une agence de voyages européenne, voire mondiale. Renaud, Jonathan, Eleni, Suzanne, Franka, Suzan, Sean, Jules, Pavlina, Alfonso, Alban, Tiphaine, Alicia, Janire, Carlota, Ander, Paloma, Raquel, Oscar, Esther, Gloria, Helena, Nora, Paolo, Federico, Caroline, Ilaria, Lars, Pauline, Emmanuel, Dina, Edith, Margot, Adeline... Ils sont 34 que j'ai recroisés depuis dans leurs villes. Et encore, je ne compte même pas une fille croisée par hasard dans le métro de Lille ou dans une rue de Bruxelles. Erasmus, ça m'a fait mes voyages, encore cet été ! (Dina à Cannes) Erasmus, ça reste à vie.
Chose étonnante de l'après-Erasmus, c'est que l'on reste parfois (souvent ?) en contact avec des personnes dont on n'était pas toujours proche pendant l'Erasmus. Exemple typique d'Helena, une jolie Espagnole (j'espère qu'elle ne lira pas cet article, au risque de prendre la grosse tête !) qui m'a hébergé chez elle en Espagne, et que j'ai hébergée chez moi ensuite. Pourtant, pendant l'Erasmus, nous n'étions pas si proches. Et aujourd'hui, c'est l'une des Erasmus dont j'ai le plus de nouvelles.
Loin des yeux, loin du cœur. Encore plus avec Erasmus, c'est certain. Mais on a une chance incroyable : Facebook. Oui, on hait tous Facebook un jour ou l'autre, mais je l'ai souvent répété : si je suis encore sur Facebook c'est notamment pour mes Erasmus. Et comme j'ai beaucoup de mal à les supprimer (je sais que certains le font !), ils restent là. Ils apparaissent toujours dans mon fil d'actualité, j'en vois un qui se marie en Pologne, j'en vois une qui se marie en Israël, j'en vois une qui fait un enfant en Finlande. Toute cette petite troupe festive rentre dans la vie d'adulte au fur et à mesure des années (sauf moi !). Je peux voir leur nouveau boulot, leur récent voyage. De temps en temps je communique avec eux, avec une petite blague, un petit débat politique très européen, ou même en lançant une invitation reprise rapidement par d'autres pour se revoir.
En vérité, se revoir est quasi-impossible. Je me vois mal faire un doodle de 100 personnes avec des emplois du temps de fous pour une simple rencontre (bien que...). Mais si le présent est absent, si tout futur semble impossible, il nous reste ce passé partagé. Ce passé d'Erasmus.
Et encore aujourd'hui, quand on parle de Canterbury, je souris. I love you guys & come to Bordeaux !