1 avril 2019 1 01 /04 /avril /2019 14:39

Après Huit Clos (génial) et Les mouches (bien), c'est un retour à mon année de terminale. A l'époque, mes cours de philosophie avaient lieu juste après la cantine. Je somnolais donc régulièrement, même si j'avoue que Monsieur Rosset expliquait plutôt bien chaque idée derrière des lignes qui me semblaient incompréhensibles lorsque j'étais confronté seul à ce livre...

Quelques années plus tard, je voulais voir un peu mon évolution : suis-je capable de le comprendre ? C'est mon troisième Sartre, je pense être prêt.

 

L'existentialisme est un humanisme (1946)

 

Quelques idées que j'ai retenues :

- L'homme est la somme de ses actes (l'existence précède l'essence) : « l'homme n'est rien d'autre que ce qu'il fait »

- L'homme fait des choix personnels qui représentent l'image qu'il souhaite de l'humanité toute entière : « il n'est pas un acte qui, en créant l'homme que nous voulons être, ne crée en même temps une image de l'homme tel que nous estimons qu'il doit être ». Bon, je ne suis pas toujours d'accord avec cette idée. Le choix qui est bon pour moi n'est pas forcément bon pour un autre, qui devra alors faire un autre choix. Ce que je considère être bon pour l'humanité, quelqu'un considérera peut-être l'inverse. Ai-je tort ? Dois-je changer de choix ? Cela part du principe qu'il existe une seule vérité à l'humanité, et je suis en désaccord avec ce principe, justement par principe. L'idée d'une seule vérité, si elle peut paraître objective, n'en demeure pas moins dangereuse (elle peut établir un rapport de force vis-à-vis de celui qui détient une autre vérité). De ce fait, je ne considère pas, à titre personnel, que mon choix engage l'humanité.

- Si Dieu n'existe pas, l'homme est liberté. Mieux, ou pire : « l'homme est condamné à être libre », c'est à dire qu'il est le seul à choisir ses actes. J'adore cette phrase.

- Les sentiments se construisent par nos actes. Très intéressant cette partie, et sans doute assez proche de la réalité.

- Il se pose deux fois la question de l'engagement, et il en arrive à l'idée que l'existentialisme s'oppose au quiétisme.

 

Un livre qui fait bien tourner la tête, et qui donne envie d'agir, de faire. De ne pas simplement être. Ce n'est pas je pense donc je suis. C'est Je fais, donc je suis. Clairement l'une des idées guidant ma vie au jour le jour.

 

Le mur (1939)

 

Le Mur est un recueil de nouvelles. Suivent la Chambre, Erostrate, Intimité, L'enfance d'un chef.

 

Le Mur est l'histoire d'un prisonnier républicain espagnol qui est condamné à mort. On lui propose alors un arrangement, il dénonce un de ses amis, et il aura peut-être la vie sauve.

La Chambre est l'histoire d'un père de famille essayant de convaincre sa fille de placer son mari, devenu fou.

Erostrate est l'histoire d'un tueur voulant se faire un nom.

Intimité est l'histoire de deux histoires d'amour d'une seule femme.

L'enfance d'un chef est celle de Lucien, futur grand chef fasciste.

 

Première chose : je crois bien que je n'aime pas les nouvelles. On a à peine le temps de s'attacher aux personnages qu'ils nous disent déjà au revoir. Oh, reviens, tu ne m'as pas tout dit ! Alors je me pose la question : choisit-on la nouvelle par manque d'inspiration ?

Le Mur est par exemple une faible copie du dernier jour d'un condamné d'Hugo. Les nouvelles suivantes ne valent pas le coup de s'y attarder. L'enfance d'un chef est plus développé, mais plus linéaire. C'est écrit d'un traite, et ça manque de pause justement. Du coup cette analyse de l'arrivée du fascisme dans la tête du personnage est trop rapide. Dommage, l'idée était intéressante.

Bref, c'est bien le premier Sartre que je n'ai pas savouré. Soit. Allez, direction La Nausée.

 

La Nausée (1938)

 

Antoine Roquentin, jeune homme de 30 ans, habite Bouville, où il fait des recherches pour un livre historique sur un conte du XVIIIème siècle. Il souffre d'une étrange maladie lui faisant avoir des crises d'angoisse. Ses retrouvailles avec son amour de jeunesse Anny sont l'un de ses derniers espoirs dans la vie.

Outch. C'est mauvais. Je veux dire, je n'ai vraiment pas aimé. Déjà, l'histoire et son scénario : rien. Ou si peu. Le livre hésite entre le roman et la philosophie. Quand on essaie de faire les deux, on fait mal les deux. Certains passages sont extrêmement longs et douloureux à lire (l'arbre et ses racines, chacune des crises du personnage en fait). Et j'en suis ressorti avec l'impression d'une belle branlette intellectuelle de son auteur. Dommage, car j'aime jusque là les livres de Sartre. Livre qui a pourtant fait sa renommée, où il évoque l'existentialisme, le néant etc. Un brouillon donc. Et il ne faudrait pas avoir à lire les brouillons.

 

Deux citations :

La passé, c'est un luxe de propriétaire

Sans doute, à son lit de mort, à cette heure où l'on est convenu, depuis Socrate, de prononcer quelques paroles élevées, avait-il dit à sa femme, comme un de mes oncles à la sienne, qui l'avait veillé douze nuits : « toi, Thérèse, je ne te remercie pas, tu n'as fait que ton devoir ». Quand un homme en arrive là, il faut lui tirer son chapeau.

 

Bon, je pense arrêter Sartre pour un moment après cette épreuve. Je ne sais pas si Les Mots ou L'être et le Néant sont faits pour moi de suite !

Les lectures de voyage, Jean-Paul Sartre
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23 décembre 2018 7 23 /12 /décembre /2018 18:15

Découvrir un pays, ce n'est pas seulement se gaver de paysages et les prendre en photos. Ça passe aussi par la nourriture que l'on trouve parfois au coin des rues, par la musique qu'on oublie trop souvent dans le fond d'un bus. C'est l'odeur d'une randonnée que l'on ne peut retranscrire, c'est l'atmosphère d'une ville coloniale. Et c'est aussi un peu de littérature. Quand je voyage, j'aime lire sur le pays, son histoire, ses coutumes. Pour la Colombie, ça passe par quelques pages d'un guide de voyage bien connu amené par ma partenaire. Mais c'est aussi Cent ans de solitude. Quel titre ! Ce livre me plaisait depuis plusieurs années, j'attendais simplement l'occasion de pouvoir le dévorer. Gabriel Garcia Marquez, prix Nobel de littérature en 1982, né en Colombie. Il paraît que ce livre est une histoire du pays, de ses conflits qui l'ont ravagé. Bref, il avait tout pour me satisfaire...

Souvenirs de Colombie : Narcos et Cent ans de solitude

Et puis, un détail : le réalisme magique. Un genre littéraire (mais pas seulement), où des éléments surnaturels apparaissent dans un environnement réaliste. Moi, l'extrémiste cartésien, me voilà aux prises avec du fantastique. Bon, je ne pars pas défaitiste pour autant, Game of Thrones a bien réussi à me conquérir avec une recette similaire. La première phrase est détonante : « Bien des années plus tard, face au peloton d'exécution, le colonel Aureliano Buendia devait se rappeler ce lointain après-midi au cours duquel son père l'emmena faire connaissance avec la glace ».

 

Le livre est l'histoire d'une famille, les Buendia, et d'un village, Macondo. Les Rougon-Macquart et Plassans en quelque sorte, mais avec un seul tome. Un couple, ses enfants, ses petits-enfants, ses arrière-petits-enfants, confrontés à leur histoire, mais aussi à l'Histoire. Pour les côtés sympas, je retiens le contexte historique, notamment les guerres civiles colombiennes qui ont marqué ce pays, les libéraux et les conservateurs, mais aussi l'arrivée des technologies dans un village reculé.

Néanmoins, et c'est un gros mais, je ne suis pas convaincu par le rythme du livre (et ça joue beaucoup). Le temps ralentit et s'accélère, passant trop vite sur des choses que j'aurais aimé lire et s'arrêtant trop longuement sur des choses qui ne m'intéressaient pas : les relations incestueuses, les désirs du corps, les prostituées, les écarts d'âges (quand quelqu'un a 145 ans...) et la magie. Les personnages sont nombreux, Garcia Marquez les travaille, puis les abandonne, puis revient sur eux (notamment dans les derniers chapitres), mais ils manquent parfois de personnalité. Le colonel Aureliano Buendia est celui que je retiens le plus, avec ses parents, parce qu'ils ont été travaillés pendant de longues pages, de nombreux chapitres. Le reste de la descendance passe trop vite à mon goût (ou alors pas assez, il y a 7 générations !). Bref, je suis resté sur ma faim, et Dostoïevski reste tout en haut, intouchable.

 

Trois citations que j'en retiens :

 

« Actuellement, la seule différence entre libéraux et conservateurs, c’est que les libéraux vont à la messe de cinq heures et les conservateurs à celle de huit heures. »

 

« Le secret d'une bonne vieillesse n'est rien d'autre que la conclusion d'un pacte honorable avec le solitude »

 

« L'amour le plus fou, le plus persistant, n'est de toute manière qu'une vérité de passade »

Souvenirs de Colombie : Narcos et Cent ans de solitude

Narcos. Là, je me demande si j'ai besoin de vous raconter, tant les séries deviennent le dénominateur commun de la culture générale. Narcos, c'est l'histoire de Pablo Escobar, le criminel colombien le plus connu de l'histoire récente. Un trafiquant de drogue, spécialisé dans la cocaïne, et qui a tenu le cartel de Medellin. Il était l'un des dix hommes les plus riches du monde, il ne savait plus quoi faire de son argent, au point où il en enterrait un peu partout, sans toujours se souvenir de ses cachettes. Elu suppléant à la chambre des députés, il est finalement poursuivi par l'Etat colombien puis par les Etats-Unis. Après des années de chaos et de tueries... enfin, bref, vous connaissez un peu l'histoire.

 

J'avais un peu peur avant de débuter cette série : je ne voulais pas voir quelqu'un que j'aurais aimé être. Je peux le dire aujourd'hui, je ne veux pas de la vie de Pablo Escobar telle qu'elle est racontée. En plus du sang sur ses mains (et pas qu'un peu, le type a été jusqu'à faire exploser des avions pour obliger le gouvernement à négocier), on voit très bien dans cette série la chute sans fin d'un baron de la drogue, de cachette en cachette, jusqu'à devoir abandonner sa propre famille et vivre reclus (comme Elisée).

 

Des choses sont assez incroyables dans cette vie : le type arrive à construire sa propre prison où il se fait enfermer, avec la bénédiction du gouvernement ! Aussi, et ça c'est toujours le cas, les Etats-Unis sont partout, ils poussent le gouvernement colombien à être intransigeant (alors que c'est ce pays qui souffre des attentats et d'une quasi guerre civile) tandis que la poudre blanche part... aux Etats-Unis ! Au lieu de balayer devant leur porte, les Américains exportent un conflit qu'ils provoquent eux-même de par leur consommation.

La série ouvre un peu le débat de la légalisation des drogues, sans trop s'y risquer non plus. Dommage, car c'est un vrai sujet. Toujours est-il que c'est une bonne série, et que je la recommande, surtout si vous partez en Colombie prochainement (évitez néanmoins de parler de Pablo en bien, ça les énerve, évoquez plutôt Gabriel Garcia Marquez!).

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23 janvier 2018 2 23 /01 /janvier /2018 14:28

Jean Cocteau, La machine infernale

 

Alors que Laïus hante les soldats pour les prévenir du drame qui s'annonce, Oedipe se retrouve devant Thèbes et rencontre le Sphinx. Après l'avoir emporté, il épouse sa mère biologique Jocaste et c'est la nuit de noce. Enfin, dans le dernier acte, Oedipe apprend la mort de son père adoptif, ce qui l'amène à découvrir la terrible vérité.

 

La machine infernale. J'attendais, derrière ce titre, une toute autre histoire ! Me revoici avec Oedipe, quelques mois après ma lecture du livre de Sophocle. La pièce est cependant différente et assez complémentaire : Cocteau imagine des scènes précédant celles de Sophocle. La première scène n'est clairement pas ma préférée (pour le côté fantastique-science-fiction) tandis que l'idée d'un Sphinx dépressif et donnant la réponse à Oedipe me laisse un peu dubitatif. Le troisième acte doit être très intéressant à voir au théâtre (attraction-répulsion). Le quatrième est mon préféré car le plus dramatique (notamment avec l'idée de la fille qui supporte son père).

Comme toujours avec la lecture d'une pièce de théâtre, j'ai envie de la voir jouer.

 

Citation : Un visage de jeune fille, c'est l'ennui d'une page blanche où mes yeux ne peuvent rien lire d'émouvant.

 

Jean-Paul Sartre, Huis Clos

 

Un homme est amené dans une pièce. Sans fenêtre. Quasiment vide. Et il doit rester là. Garcin le sait, c'est son purgatoire. Il va enfin pouvoir faire le point sur sa vie, sur ses actes. Mais la présence d'Inès et d'Estelle le dérange dans sa démarche. Chacun d'eux est pourtant là pour une raison. Pas d'échappatoire. Et une conclusion : l'enfer, c'est les autres.

 

Pièce de théâtre moderne, Huis Clos imagine une « vie » après la vie. La tension qui règne dans la pièce monte au fur et à mesures des lignes. Pièce agréable à lire, à voir ce que ça donnerait sur scène.

 

Jean-Paul Sartre, Les mouches

 

Oreste est le fils du roi d'Argos Agamemnon. Celui-ci a été assassiné, avec l'aide complice de sa femme. Oreste a été abandonné mais a survécu et est devenu un homme sage, éduqué. Il revient à Argos alors que la ville est en perpétuelle repentance, encouragée en cela par Jupiter. Après des discussions avec Electre, sa sœur maltraitée, il prend la décision de tuer l'assassin de son père, amant de sa mère, nouveau roi d'Argis, ainsi que celle-ci.

 

Pièce à l'apparence classique, les Mouches n'en demeure pas moins extrêmement anti-religieuse, opposant l'homme libre (Oreste) au Dieu Jupiter. A travers sa pièce, Sartre parvient à faire passer son message, quand bien même celui-ci peut être sanglant.

 

Citation : Le secret douloureux des dieux et des rois, c'est que les hommes sont libres

 

Alexandre Pouchkine, La dame de pique

 

Traduit par... Prosper Mérimée !

 

Hermann, jeune officier sans vice entend parler d'une histoire extraordinaire : une vieille dame, le comtesse Anne Fedotovna, aurait connu le secret de la victoire à coup sûr à un jeu de carte. Troublé, Hermann décide de séduire Lisabeta, la gouvernante, afin d'avoir accès à la vieille. Mais son plan rencontre un accroc... la dame de pique.

 

Après le Joueur de Dosto, c'est le deuxième ouvrage russe consacré au jeu que je lis. La nouvelle se lit vite et facilement (ça change). La chute est parfaite. Critique acerbe de l'aristocratie pour ses manières (ou ses non-manières) et de l'ambition des hommes, prêts à tout pour s'enrichir. Mon premier Pouchkine, que je valide bien plus que Gogol !

 

Alexandre Pouchkine, Doubrovsky

 

Cyrile Pétrovitch Triekourof est un puissant homme dans sa campagne russe. Mais il n'a qu'un seul véritable ami : André Gavrilovitch Doubrovsky. D'une insulte à une expulsion de sa demeure, il n'y a que quelques pays que Troïekounof emprunte. Son ami décède, en colère. Son fils revient alors et, fort du caractère de son père, préfère brûler la maison que de la laisser à Troïekounof. Il empunte dès lors une carrière de bandit Robin des Bois, prince des cœurs.

 

Amitié, revanche, vengeance, fierté... de nombreuses valeurs sont abordées dans cette nouvelle. Et fidélité. La chute est incompréhensible pour notre époque, et terriblement vraisemblable début XIXème.

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30 avril 2017 7 30 /04 /avril /2017 04:25

Platon, Le procès de Socrate

J'avoue avoir eu une certaine appréhension avant de débuter ce livre. Platon, Socrate, tout cela ressemblait fort à de la grande philosophie, et je ne savais pas si c'était facile d'accès. Voyez-vous, je pense souvent que je ne sais rien, ou pas grand chose. Sans m'en rendre compte, j'étais un vrai "Socratien"!

Le procès de Socrate est un livre divisé en 3 parties. Tout d'abord l'Eutyphron, qui présente la manière de penser de Socrate, face à un devin. A force de questions, il parvient à faire se remettre en cause son interlocuteur et ses affirmations initiales. La deuxième partie est l'Apologie de Socrate, à savoir sa défense dans le procès qui lui est intenté. Pour les non-historiens, Socrate, à l'age de 70 ans, est accusé de corrompre la jeunesse et de nier l'existence des Dieux. Sa défense, telle que la présente Platon, combat une à une les accusations, en montrant notamment les contradictions. La fin de son discours est très intéressante, quoique parfois non-dénuée d'une pointe de sentiment de supériorité. Jugé coupable, Socrate réclame les honneurs pour peine... Condamné à la peine de mort, il termine par un discours offensif, ne regrettant rien, Papy Socrate semble sûr de ses valeurs, et les défend jusqu'au bout, même quand Criton veut le faire échapper dans la dernière partie du livre.

J'ai beaucoup apprécié le fonctionnement de la raison de Socrate, à base de nombreuses questions remettant tout en cause. Son discours sur les valeurs et sur la mort est passionnant. Aucune idée de la précision historique de Platon, mais il n'en reste pas moins que ce procès est caractéristique de la rapide agonie d'Athènes à la fin du Vème siècle. Périclès, Socrate, la fin des géants.

Extraits : Personne ne connaît ce qu'est la mort, ni si elle n'est pas le plus grand de tous les biens pour l'homme. Cependant on la craint, comme si l'on savait certainement que c'est le plus grand de tous les maux.

Ce n'est pas la richesse qui fait la vertu, c'est la vertu qui fait la richesse.

Sophocle, Oedipe-roi

La peste s'abat sur Thèbes. Apres avoir consulté l'oracle de Delphes, il est décidé de retrouver le meurtrier de Laios, ancien roi, assassiné il y a plusieurs années. Oedipe, roi aimé et respecté depuis qu'il a délivré la ville du Sphinx, se lance à sa recherche, sans savoir que c'est lui-même le meurtrier. L'histoire est dramatique : abandonné par ses parents à sa naissance en raison d'un oracle, il est élevé par Polybe et Mérope. Il finit malgré tout par tuer son père biologique et par épouser sa mère, Jocaste. Celle-ci se suicide en découvrant l'affaire, tandis qu'Oedipe se crève les yeux.

Je connaissais un peu cette histoire mythologique, et notamment le syndrome en découlant. Sophocle la met en scène de façon originale, en raison du choeur qui coupe les scènes et les relie. Je voudrais bien voir ce que ça donne sur scène. 

Antigone, fille d'Oedipe est une autre pièce de Sophocle. A lire, avec Ajax. A noter que ce fut un bon livre pour réviser l'histoire grecque (notamment la religion).

Fiodor Dostoïevski, Le joueur

Alexcis Ivanovitch travaille pour un général russe. Il est amoureux de Paulina, la belle-fille de celui-ci. L'ensemble de la famille est en Allemagne, à Roulettenbourg, ville du jeu. Des secrets, des amours et des trahisons se font et se défont, Alexis essayant surtout de comprendre ce qui se passe chez Paulina, notamment avec ce Français, et cet Anglais, et Madame Blanche... et la Babouchka, qui ne meurt toujours pas. C'est pourtant elle qui a tout l'argent.
Je suis fan de Dostoïevski : Crime et châtiment a changé ma vie. Difficile d'être objectif dans ces conditions : le style d'écriture me plaît toujours autant, certains personnages sont particulièrement bien trouvés (la babouchka) et les questionnements du personnage principal sont toujours au coeur des intrigues. L'univers du jeu est bien traité, les fortunes se faisant rapidement, mais se perdant encore plus vite. J'ai hâte de trouver les possédés.

"L'homme est despote par nature et la femme bourreau"

Antoine Compagnon, Un été avec Montaigne

Les essais de Michel de Montaigne sont les pensées de l'écrivain, développées tout au long de sa vie. Il les rature, il les annote, et il les publie à plusieurs reprises. Compagnon se propose de nous guider pour mieux comprendre le livre, avec 40 idées, 40 essais.

J'ai eu un peu peur au départ, car je ne comprenais pas les passages cités. Montaigne écrit dans un style ancien, en vieux françois, et nous sommes parfois dans de la philosophie pure. Mais Compagnon, fort de son expérience radiophonique, réussit à être didactique, sans me prendre non plus pour un idiot. On sent qu'il est fan de son philosophe, et il manque un peu de recul critique, mais cela n'empêche pas le lecteur attentif que j'étais d'apprécier le moment.

Quelques passages m'ont fait réfléchir :

Pourquoi le miséreux n'agrippe pas le riche à la gorge m'a interpellé sur le rôle de l'éducation dans l'acceptation de la pauvreté. 
Socrate dit "je ne sais rien". Il sait donc qu'il ne sait rien. Montaigne va plus loin, puisqu'il se demande "Que sais-je ?"

Le chapitre 10 est excellent, il traite du temps libre et de son utilisation par le cerveau.
Le chapitre 11 m'interpelle sur la volonté d'écrire.

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23 avril 2017 7 23 /04 /avril /2017 04:38

Amis des classiques français, bonjour ! Là, on est dans l'intemporel, et même sans les avoir lus, vous connaissez certains titres. 

Alfred de Musset, Les caprices de Marianne

Coelio, amoureux de Marianne, femme de Claudio, et vertu incarnée, Difficile dans ces conditions de lui trouver une solution. Mais Octave, son meilleur ami, et cousin de Claudio, est persuadé qu'il va réussir. Avec persévérance, mais aussi naïveté, il croit renverser une situation amoureuse, sans se rendre compte de son erreur.
Pièce assez classique, rapide (2 actes) et qui manque sans aucun doute d'originalité. Les raisons du changement d'esprit de Marianne sont esquissées, il manque peut-être un acte supplémentaire pour donner du corps (et du coeur) à l'intrigue.

Extrait : "Vivre pour une autre me serait plus difficile que de mourir pour elle".

Alfred de Musset, On ne badine pas avec l'amour

Le titre en soi mérite que je m'y attarde. Badiner avec l'amour. Quelle belle expression. Qui annonce la couleur, l'humeur, les coeurs, les malheurs. Le baron ramène dans son château son fils et sa nièce, bien décidé à les marier. Perdican a reçu une grande éducation à Paris, mais il revient sans avoir changé. Son village et ses ami(e)s lui ont manqué, et les moments de sa jeunesse restent gravés dans sa mémoire. Mais pour son ancienne comparse et promise Camille, les choses ont bien changé. Décidée à entrer au couvent, elle met une barrière physique et psychologique avec la vie du château, et donc son cousin. Celui-ci reste profondément amoureux de sa cousine, et de ses souvenirs. Il prend comme décision de se rapprocher de Rosette, jeune villageoise de son âge qui accepte de se remémorer et de revivre leur jeunesse. La fin est dramatique.

Amusant grâce aux personnages du gouverneur et du curé, mais surtout très fort grâce aux confrontations Perdican/Camille. La dernière scène de l'acte 2 est grandiose, amour et religion se faisant face dans un débat comme j'en ai rarement lu. La dernière réplique de Perdican dans cette scène mériterait d'être citée en entier. Un coup de coeur pour cette pièce, alors que le théâtre est toujours loin d'être agréable à la lecture. Il faut que j'aille voir des classiques joués sur les planches, par curiosité.

Extraits : "Je me suis élevé de quelques pieds vers le ciel, et vous vous êtes courbés de quelques pouces vers le tombeau".

"Je ne suis pas assez jeune pour m'amuser de mes poupées, ni assez vieille pour aimer le passé".

Guy de Maupassant, Contes de la bécasse

A la suite d'un repas de chasse, le convive ayant été désigné pour manger les têtes des bécasses s'engage à conter une histoire. Maupassant se propose ici de rassembler les meilleurs. En vérité, ces contes sont ceux qu'il a publiés lors de l'année écoulée (1882-3) dans deux journaux. Leur point commun ? La grande majorité traite de sa Normandie. Hormis cela, la thématique vagabonde, avec quelques comédies cinglantes (Ce cochon de Morin, Farce normande, Les Sabots...) mais aussi des drames. Pierrot est ainsi le prénom d'un chien jeté dans un puits, agonisant pendant plusieurs jours. La rempailleuse est l'une des histoires d'amour les plus cruelles qu'il m'ait été donné de lire. En mer évoque la perte d'un bras par avarice. Et puis il y a la guerre de 1870, ancrée dans la mémoire collective, et évoquée dans La folle, Saint-Antoine ou L'aventure de Walter Schnaffs, les deux premiers contes étant sanglants, tandis que le dernier évoque avec un immense sarcasme une grande victoire française. Il est question d'amour (Menuet), parfois filial (Le Testament, Aux champs, Un fils) mais aussi de religion, plutot moquée (Un normand). Enfin, il y a La peur, que j'ai un peu moins saisi.
Mes quatre contes préférés (je voulais faire un top 3, mais ce fut difficile !) : Ce cochon de Morin pour sa légende, Pierrot pour le drame, Un fils pour la souffrance, L'aventure de Walter Schnaffs pour l'absurde.
C'est mon quatrième livre de Maupassant (Une vie, Pierre et Jean, Bel-Ami). Le style, dû au format, est différent. L'emploi du patois est régulier, ces passages me plaisant particulièrement. L'ensemble se lit aisément, et si on ne peut forcément pas développer le caractère des personnages, c'est tout de même agréable de faire varier les sujets, et donc les plaisirs. L'idée des nouvelles me plaît bien du coup.

Extrait de L'aventure de Walter Schnaffs : Tout ce qui est doux dans l'existence disparaît avec la vie.

Charles Baudelaire, Le spleen de Paris

Après les fleurs du mal, voici mon second recueil de poèmes de l'autre grand Charles. Enfin, peut-on vraiment parler de poèmes ? Des pensées, certes. Mais sans réel rythme, sans rime. L'ensemble est saccadé, et alterne quelques bons passages avec du passable. On sent le dépressif. On sent aussi le talent. Je me régale parfois de simples oxymores, "éloquence muette" et surtout la "Sainte prostitution" (on n'a pas fait mieux depuis !). Les 50 textes abordent la capitale, vue d'en bas : les miséreux et les caniveaux, les artistes délaissés et les filles enchaînées. Il y a parfois de la méchanceté qui transparaît (le mauvais vitrier, assommons les pauvres). Il y a aussi l'envie de s'en aller, de déguerpir, de voyager, là bas, où les heures plus lentes contiennent plus de pensées (l'invitation au voyage), de prendre la mer (déjà). Baudelaire rêve de liberté, et d'amour.

Et puis il y a ce petit texte, pour moi le chef d'oeuvre du livre : "Mon beau chien, mon bon chien, mon cher toutou, approchez et venez respirer un excellent parfum acheté chez le meilleur parfumeur de la ville". Et le chien, en frétillant de la queue, ce qui est, je crois, chez ces pauvres êtres, le signe correspondant du rire et du sourire, s'approche et pose curieusement son nez humide sur le flacon débouché ; puis, reculant soudainement avec effroi, il aboie contre moi, en manière de reproche.

"Ah ! misérable chien, si je vous avais offert un paquet d'excréments, vous l'auriez flairé avec délices et peut-être dévoré. Ainsi, vous-même, indigne compagnon de ma triste vie, vous ressemblez au public, à qui il ne faut jamais présenter des parfums délicats qui l'exaspèrent, mais des ordures soigneusement choisies".

Lecture parfois difficile (besoin de relire 3 fois les phrases pour comprendre l'idée), avec un vocabulaire très soutenu et varié. L'ensemble reste toutefois inégal, et, surtout, vaguement poétique.

Pierre Corneille, L'illusion comique

Il me semble avoir lu Le Cid dans ma jeunesse, mais j'avoue que ma mémoire me fait défaut. Du coup, je considère un peu ce livre comme mon premier Corneille. Et quel livre ! Je râlais il n'y a pas si longtemps du dénominatif de poésie donné au Spleen de Paris de Baudelaire, et voilà que je me retrouve face à une pièce de théâtre en vers ! Woh ! J'étais un peu inquiet au départ, craignant que cela n'alourdisse le texte. Mais pas du tout, au contraire. L'histoire reste limpide, et je me suis délecté du talent de l'auteur pour la rime. Un chef d'oeuvre technique.

L'histoire est celle d'Isabelle, désirée par tant d'hommes mais qui choisit Clindor, simple second d'un drôle de capitaine. Elle quitte tout pour lui, amis, famille, argent et titre. Mais l'heureux élu finit par fricoter avec la femme de Florilame. La scène semble tragique. Elle est suivie de près par Primadant, père de Clindor, qui n'est pas au bout de ses surprises. La chute finale est intéressante et change des tragédies-comédies classiques. 5 actes, 1824 vers de plaisir.



La prochaine fois, je serai philosophe !

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16 avril 2017 7 16 /04 /avril /2017 15:42

Combien de livres lirais-je par an sans Internet ? 100 ? Moins ? Peut-être plus ? Aucune idée, mais les faits sont là : je n'ai pas lu de livre depuis deux ans. Excepté ceux qui concernaient ma thèse, ce qui fait un sacré paquet tout de même. Mais j'évoque aujourd'hui la littérature, la vraie ! Et mon compteur 2015-2016, vierge, m'embête un peu. De ce fait, j'ai pris 9 livres dans mon sac às dos ! Un sacrifice au niveau kilogramme (quoique la collection Librio n'est pas gourmande), mais un bonheur au jour le jour. Car, sur la plage ou dans les parcs, allongé dans mon lit ou assis au restaurant, je mange régulièrement de la littérature. Premier tour d'horizon.

 

Victor Hugo, Le dernier jour d'un condamné. 

Mon premier Hugo, après avoir essayé plusieurs fois Notre Dame de Paris. Moins de 100 pages pour résumer le dernier voyage d'un condamné. Quelles seraient vos pensées, vous, s'il n'y avait que quelques heures à vivre, et que vous étiez enfermé dans une pièce close ? Je pense que ça partirait dans tous les sens. Et c'est exactement ce qu'Hugo fait faire à son prisonnier. La forme le montre bien : près de 50 chapitres pour un si petit bouquin ! Alors on pense à ses conditions, à ses visites, au curé, à la religion, à sa fille, aux petits bonheurs de l'enfance, à s'échapper... et à la mort. Surtout. Omniprésente. Pas une seule fois il n'aborde le motif de sa condamnation. Qu'importe le crime, ce qui compte, c'est le châtiment du condamné. Moral, surtout. Physique, ce sera une demi-seconde, le temps que la guillotine fasse son effet. Cette pensée l'obsède. Et cette obsession le tue, à petit feu. 

Manifeste contre la peine de mort ? Je le pense, et Hugo, par son récit à la première personne, semble l'affirmer. Bien écrit, intéressant, bref, je recommande.

Gogol, Le manteau, Le nez

Première lecture de cet auteur russe au nom si amusant pour l'enfant que je suis encore. Le style est plaisant, avec quelques sarcasmes sur l'Etat russe, ses fonctionnaires, ses militaires. L'histoire est celle d'un de ses fonctionnaires subalternes, Akaki, consciencieux dans son travail de recopie, et qui ne désire rien de plus. Sujet aux moqueries de ses collègues, il arbore un manteau en ruine qui ne passe pas, cette fois, l'hiver. Ce qui est un drame financier devient peu à peu une immense fierté. Le manteau, c'est une histoire de vie. De jalousie. N'ayez rien, et vous ne serez pas envié semble dire l'auteur. La fin me dépasse un peu (les histoires de fantôme et moi...).

Le nez est un récit fantastique : Kovaliov a perdu son nez, et ne se souvient plus comment. C'est le barbier qui l'a coupé. Or, il croise son nez dans la rue, celui-ci se baladant tel un grand fonctionnaire. Récit loufoque, qui semble être le style de l'auteur, moins le mien.

Gogol, Le journal d'un fou

En voilà d'un titre bien trouvé ! Gogol a-t-il été traumatisé par les représentants de l'Etat ? Il fait en tout cas une fixette sur le sujet ! L'histoire est celle d'un fonctionnaire subalterne russe qui éprouve des sentiments pour la fille de son supérieur. Alors que l'histoire suit son cours, un élément perturbateur transforme le récit, celui-ci passant du "normal" au "cinglé". La succession du roi d'Espagne est difficile, et le personnage principal considère que c'est lui, le nouveau roi. Dès lors, la folie prend le pas sur le récit. Etrange.

Gogol, Le portrait

Le récit que j'ai préféré de Gogol. S'il n'a pas la tendresse du manteau, le portrait s'essaie à la leçon de vie : Tchartkov est un peintre sans le sou, mais avec un immense talent. Il pourrait devenir le prochain Raphael, et laisser son nom dans l'histoire de la peinture. Son destin est bouleversé par l'achat d'un vieux tableau, très original : à l'intérieur, il découvre une petite fortune ! Que faire de cet argent ? L'utiliser pour développer son talent, diamant brut ne demandant qu'à être poli ? Ou mener la vie d'aristocrate dont rêve toujours le jeune homme en pleine force de l'age ? Ange ou démon ? Poussé par ses envies, il choisit la seconde option, et obtient appartement, vêtements et même réputation, grâce à de l'argent bien placé chez un journaliste renommé. Il dessine alors son premier portrait qui fait sensation. Le talent est là, et il est reconnu. Mais Tchartkov va seulement l'utiliser à faire des portraits sans saveur pour des aristocrates. Il perd peu à peu son talent, tout en devenant le peintre à la mode. L'art pour la grandeur de l'art ? Etre reconnu de son vivant ? Des questions se posent à la lecture de cette histoire. Une réponse est déjà là : c'est avec l'art que l'on peut laisser une empreinte. L'écriture sera l'une des miennes. Tchartkov, bouleversé par une toile, en arrive à acheter les plus belles oeuvres de son époque pour les détruire, alors qu'il s'est rendu compte du gâchis de ses possibilités.

Gogol, La perspective Nevsky

Nous sommes ici dans une rue de Saint-Pétersbourg : la plus connue et intéressante pour Gogol. Elle lui permet d'écrire sur une masse de personnages, d'habitudes, d'échoppes, au gré des heures, pour parvenir à ses deux personnages principaux : Piskariov et Pirogov. Le premier, petit peintre de son espèce, suit une jolie brune tandis que le second suit une belle blonde. Piskariov est obnubilé par la beauté de cette fille. Attention, ce n'est "pas une passion sensuelle. Non ! il était aussi pur en cet instant que l'adolescent vierge qui ne ressent encore qu'une aspiration indéfinie, toute spirituelle, vers l'amour". C'est tout juste s'il ose la regarder, et, dès qu'elle croise son regard, il se hâte de baisser les yeux. Trop belle pour lui ? A son grand étonnement, elle lui fait signe de le suivre. Arrivé dans un appartement, il s'aperçoit que cette déesse, symbole de la pureté et de l'innocence, travaille pour les vices du corps. Chaque mot qu'elle prononce assassine la magnificence de la perspective Nevsky. Traumatisé, il la rencontre en rêve, douce et caline, belle comme une matinée de printemps. Il cherche dès lors chaque nuit à prolonger ce songe, allant jusqu'à prendre de l'opium pour tomber endormi : la beauté du rêve lui valait plus que la banale réalité. Finalement, il décide d'aller la retrouver, et de la demander en mariage. A son refus, il se tranche la gorge. Pour Pigorov, l'histoire est moins dramatique : cette blonde est mariée et il va tout de même lui faire la cour, jusqu'à ce que son Allemand lui fiche une correction. L'histoire est moins aboutie.

Le bilan de Gogol, c'est que le style est vraiment différent de Dostoievsky, ma référence russe. Le fantastique ne me plait guère, mais j'avoue avoir apprécié ces courts portraits, notamment lorsqu'ils sont ponctués de leçons de vie.

Gael Faye, Petit pays (c'est aussi sa chanson !)

Difficile d’être objectif lorsque j’évoque un livre ayant pour thème le Burundi et le Rwanda… forcément j’étais très intéressé à la base ! Gael Faye écrit un roman, mais est-ce autobiographique ? Je me pose la question, car il y a tellement de vrai là-dedans, de ce que moi je connais de ces deux pays, et notamment de Bujumbura. Je me suis revu dans certaines de ses rues, à longer ses bâtiments. Cette ville, son lac, et ses habitants. Gael Faye, qui affirme le contraire, décrit cependant à merveille les codes, les coutumes, les non-dits, la rumeur. C’est un livre historique, je me pose d’ailleurs la question de la compréhension de certaines références pour les non-initiés. Mais cela n’empêchera personne d’apprécier le scenario, une sacrée claque ! (le livre a été encensé par la critique !). Le style est limpide, pas larmoyant (et pourtant il pourrait). L’histoire est celle d’un enfant ayant la double nationalité franco-rwandaise, grandissant dans un Burundi au bord de l’abîme (décennie 1990), dans une famille en crise (le divorce des parents). On y aborde les amitiés de jeunesse, croix de bois, croix de fer, les grandes joies, les grandes peines, les mariages, les décès. La vie, dans les Grands Lacs. Toujours fragile. Un livre trop contemporain, malheureusement.

J'aime beaucoup les anecdotes, notamment sur les différents coups d'Etat qu'a connu le pays, reconnaissable à la musique classique ininterrompue à la radio, ou sur l'étrange atmosphère de ni paix, ni guerre, qui correspond bien à la situation actuelle.

Petit extrait : "La souffrance est un joker dans le jeu de la discussion, elle couche tous les autres arguments sur son passage"

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14 novembre 2014 5 14 /11 /novembre /2014 21:14

La beauté de l'automne
est un éphémère arc-en-ciel
dont se pare le bois mouillé

des feuilles multicolores

 

L'ennemi a attaqué dès la fin de l'été

profitant de la première gelée
soufflant le chaud et le froid
tentant d'arracher les feuilles de là

Sur leur arbre perchées
les feuilles se sentaient fortes
Elles ne semblaient pas pressées
de devenir les feuilles mortes

 

Profitant de l'été indien
elles respiraient la vie

en cachant en vain
une apparence jaunie

 

Certaines d'entre-elles se mirent à rougir

D'autres restaient vertes de plaisir

Et un collier de couleurs

Habillait les arbres en pleurs

 

Au détour d'une nuit

la guerre froide apparut

Glaçant le sang
Des feuilles dévêtues

La division feuillue
perdit des hommes
Se retrouvant dépourvue

Des couleurs de l'automne

 

Le vent dans sa cruauté
continuait son massacre
Au sol gisaient les cadavres

Les feuilles saignaient, agonisaient

L'ennemi rugissait de toutes ses forces
Dans un souffle infini
Inlassablement, toute la nuit
Jusqu'à en briser l'écorce

Lorsque la lumière du jour apparut
On compta les victimes
Dans toutes la rue, jusqu'à la cime
D'un arbre devenu nu

 

Le collier de couleur était brisé

L'automne complètement martyrisé

Les rumeurs étaient donc vraies, darling

Winter is coming

Winter is coming
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7 octobre 2014 2 07 /10 /octobre /2014 22:15

Direction l'opéra de Bordeaux ce soir, pour une représentation de La Bohème, de Puccini. La technique de radin du jour : venir le jour même, une heure avant la représentation. Les derniers tickets sont mis en vente à 8€ pour les moins de 26 ans. Quoi, je n'ai plus 26 ans ? Je ne savais pas ! Et eux non plus ! Résultat, je suis au cinquième rang, à côté d'un type qui a payé 45€. Idée radine du jour validée !
Je ne suis pas un grand spécialiste de l'opéra (c'était seulement ma deuxième fois), mais c'est toujours assez impressionnant. D'entrée, le bâtiment même de l'opéra de Bordeaux en impose. De l'extérieur, déjà.

 

La bohème, Puccini

Mais à l'intérieur, quand vous franchissez les portes...

La bohème, Puccini

Oui, magnifique. J'aurais pu rester deux heures à regarder le plafond que ça m'aurait déjà plu ! Bon, il y a quand même un opéra en cours, regardons devant nous. L'orchestre se met à jouer, les artistes entrent en scène.

L'opéra est un genre assez particulier, une histoire chantée. Il faut aimer. Personnellement, les deux heures et demie m'ont plu. Puccini, vous devinez, c'est de l'italien. Mais les sous-titres français, au-dessus de la scène, aident beaucoup à la compréhension.

 

La mise en scène, bon, pour ce que j'en connais, était très contemporaine. Puccini, mais dans les années 1960. J'étais surpris, ce n'était pas du tout ce à quoi je m'attendais. On est loin d'un opéra classique. De Gaulle était dans la télévision, Musette se trémousse sur un bar, en petite tenue. Sensation assez étrange. Je ne sais pas si je dois dire que j'ai aimé. La musique, dans tous les cas. Les acteurs plutôt. La mise en scène était originale. Oui, affirmation assez diplomatique !

A la fin, le moment assez étrange pour moi : les applaudissements. Il y a tout un code. Pendant dix minutes on applaudit à en avoir les mains qui chauffent sévère. Et vas-y que les premiers rôles passent, puis les seconds, puis les figurants, puis le metteur en scène, puis le chef d'orchestre. Et puis on repart pour un tour, avec les seconds rôles, puis les premiers, puis tout le monde ensemble, puis le chef d'orchestre, puis les premiers rôles. Et pendant ce temps là tu continues à applaudir, à t'en faire mal aux mains !

Mais la soprano, mimi, ouah ! Quelle voix !!
[je vous présente la vie bordelaise très vite)

La bohème, Puccini
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4 juillet 2014 5 04 /07 /juillet /2014 19:37

Fiodor Karamazov est un père de famille russe sans scrupule. Un mauvais homme. Il a trois fils : Dimitri, l'aîné, militaire, colérique, impétueux. Ivan, homme solitaire, raisonné, rationnel, ne croyant pas en Dieu. Et Alexei, le plus jeune, engagé dans les ordres, homme de foi et de justice.
L'amour que Dimitri porte pour Grouchenka est contrarié par son père, qui souhaite lui-même l'épouser.


Difficile de faire un résumé de ce livre tant il est immense. Un peu plus de 1000 pages dans la collection que je possède. J'ai mis près d'une année à le lire. J'aime beaucoup Dostoïevski pour sa façon d'écrire, son sens du détail, sa façon de cerner les personnages. Et ce livre est un petit chef d'œuvre. Le plus grand pour beaucoup des admirateurs de l'écrivain.
La famille Karamazov présente tous les problèmes qu'une famille peut connaître. L'argent. L'amour. Le sentiment d'abandon. La différence de point de vue sur le sens de la vie. Et pourtant, cette famille qui se déchire laisse place parfois à tellement de bonté. Un véritable esprit fraternel semble même toucher les frères à la fin du livre.

Ce livre est une fresque. Une fresque des bouleversements que la Russie traverse à la fin du XIXème siècle (l'abolition du servage, la remise en question de la religion). C'est un livre très mystique (le personnage du staretz notamment). Il faut toujours être concentré au moment de la lecture. Parfois, les choses vont tellement en profondeur qu'il me fallait relire la page trois fois avant de parfaitement cerner une idée. C'est aussi un livre russe dans toute sa splendeur pour les noms (composés, souvent deux prénoms, les personnages ont en moyenne cinq surnoms !).

Alexei semble, au contraire des autres, être le personnage parfait. Dostoïevski avait perdu l'année précédente son fils de trois ans, nommé Aliocha. Et il semble avoir voulu donner toutes les qualités à celui-ci (modestie, sens de la réflexion, de l'honneur, quête de la bonne décision, du bon chemin à prendre).

 

La morale de cette histoire ? J'ai l'impression que Dostoïevski ne croit pas en l'athéisme. Qu'il en a peur. Il considère que l'homme non-croyant serait capable des pires atrocités. Sans pour autant donner une vision très optimiste du croyant. Dostoïevski était pendant très longtemps un agnostique, avant de devenir un fervent croyant sur la fin de sa vie. Son livre s'en ressent.

Voilà, ca y est. Après l'Idiot, Souvenirs de la maison des morts, Crimes et Châtiments, et donc Les frères Karamazov, j'en ai fini avec mon Dostoïevski. Il y a bien d'autres livres (Le joueur, L'Eternel mari, L'adolescent). Mais je crois avoir fait le tour des principaux. Néanmoins, je pense rester en Russie. Les nouvelles de Pouchkine m'accompagnent.

 

Citations .

Plus j'aime l'humanité en général, moins j'aime les gens en particulier.

On compare parfois la cruauté de l'homme à celle des fauves, c'est faire injure à ces derniers.

Rien ne peut compenser une seule larme d'un enfant.

Il vaut mieux laisser partir dix coupables que châtier un seul innocent.

Comme la vie est belle quand on a fait quelque chose de bon et de vrai.

 

 

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26 février 2014 3 26 /02 /février /2014 10:30

C'était un accident bête, un vélo sur le sol

Le pavé heurtant ta tête, le sang coulant dans la rigole.


J'étais chez moi, je t'attendais,

un drôle d'émoi me parcourait,

sans nouvelle je pris la route,

dans ma cervelle campait le doute.


Sur les lieux de l'accident je ne comprenais pas

qui gisant, qui ne se relèverait pas

trouvant ma boucle d'or

teintée de sang et or.

Une souffrance indescriptible, un couteau dans le cœur,

un mal incombustible me plongeant dans le malheur,

c'était les cris, c'était les larmes,

l'incompréhension, les appels à Dieu,

 j'étais proscrit, j'étais sans arme,

sous-tension et ne pouvant te dire adieu.


Je pleurais nos moments passés,

je pleurais nos moments futurs,

je pleurais nos souvenirs,

je pleurais notre avenir,

toutes ces choses que nous voulions faire à deux,

toutes ces choses que l'on fait en amoureux.

Je me retrouvais seul au milieu de la route,

au milieu de ma vie, au milieu de mes doutes,

sans la lumière qui éclairait mes jours,

sans la flamme qui éclairait notre amour.



Je me suis réveillé au milieu des draps mouillés,

un océan de larmes reposait sur l'oreiller,

je tournais la tête, observant ton visage,

me faisant une vraie fête d'un tel paysage.

Ce matin j'ai pleuré
 parce que tu étais vivante,

à mes côtés, telle une revenante.


J'ai pleuré nos moments passés,

j'ai pleuré nos moments futurs,

j'ai pleuré nos souvenirs,

j'ai pleuré notre avenir,

toutes ces choses que nous allons faire à deux,

 toutes ces choses que l'on fera en amoureux.

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