Le Cambodge est l’un des 3 cas de génocide officiellement reconnus par l’ONU (avec l’Allemagne nazie et le Rwanda). Cela se passait dans les années 70, et l’Occident ferma les yeux pendant trop longtemps sur les pratiques des Khmers rouges et de leur chef : Pol Pot.
Bokor est la principale attraction touristique autour de Kampot. C’était la station balnéaire française du temps de la colonisation. L’idée était simple : comme les Français ne pouvaient pas revenir dans la métropole pour des vacances à la neige (déjà ce n’était pas la mode, puis le coût et la longueur du trajet, sans avion, rebutaient les plus motivés), le gouverneur eut l’idée de construire une station touristique tout en haut de la chaîne de montagnes des éléphants, au milieu du froid et du brouillard. Les jeunes Français n’ayant jamais connu la métropole pouvaient ainsi s’imaginer en Europe (d’autant plus que l’endroit était interdit aux Cambodgiens). Un casino, un hôtel ou une église occupent toujours les lieux. Ils étaient abandonnés jusque la fin des années 1990, ce qui donnait un charme particulier à la station. L’hôtel sort tout droit de Shinning et l’église respire des fantômes selon notre vieux Lonely Planet.
Ce fut une grosse déception. La montagne a été récemment achetée par Sokimex pour 100 millions de dollars et un bail de 99 ans. Qu’est-ce que Sokimex ? Le mastodonte cambodgien. Sokimex c’est le pétrole, des hôtels ou une compagnie aérienne. Sokimex a aussi acheté une plage ou les droits d’entrée d’Angkor Wat pour 10 millions de dollars l’année (on dit que l’augmentation des droits d’admission, 20$ par jour actuellement, rapporte 50 millions à l’entreprise à la fin de l’année). Sokimex achète une montagne. L’idée est de construite un immense casino, un hôtel de 400 chambres, entre 3 et 5 étoiles. Okhna Sok Kong, fondateur et directeur de la compagnie est une sorte d’émir du Cambodge. Niveau corruption, vous ne serez plus étonné de trouver le Cambodge dans les profondeurs du classement.
Heureusement la visite a été sauvée par notre guide, « Tri ». Officiellement à la retraite, il est venu pallier une absence. « Tri » c’est un peu d’histoire cambodgienne.
A 12 ans, en 1970, il a dû se réfugier dans la forêt pour tenter d’échapper aux bombardements de Nixon, obnubilé par le Vietnam. Il se retrouve très vite une arme à la main. Puis les Khmers rouges sont arrivés au pouvoir (17 avril 1975) et il est entré en résistance. 49 de ses proches ont été assassinés – entre un et deux millions dans l’ensemble du pays. De son côté, il est parti au Vietnam pour rejoindre les différents opposants, entrainés par les Viêt-Congs. Il revient en libérateur (en 1978-9), épaulé par l’armée vietnamienne. Souci, ces derniers s’installent sur le long terme. Il faut attendre 1991 pour voir l’armée de Saïgon quitter le pays (accords de Paris). L’ONU prend le relais en 1992, et « Tri » travaille pour eux, apprend l’anglais.
Jusqu’à la mort de Pol Pot en 1998, la situation est difficile. Des Khmers rouges sont toujours cachés dans les montagnes ou les forêts. Ils terrorisent la population et fonctionnent à coup de pose de mine antipersonnel (dont le pays n’est pas encore débarrassé)
« Tri » s’est finalement reconverti dans le tourisme, celui-ci se développant d’année en année dans le sud-est du pays. Sacré Tri et sacrée vie !
Bon, après ces histoires de bombes, de morts ou de génocide, observons ce magnifique coucher de soleil.
Kampot est traversé par la rivière Kampong Kandal. En nous baladant dans les rues, nous avons l’impression que les touristes représentent un gros quart de la population. Beaucoup d’hôtels affichent complet et il faut être attentif aux places qui se libèrent pour entrer dans notre restaurant favori. La ville est petite, mignonne, rythmée par la vie des Occidentaux. Man Utd vs Man City rassemble les amateurs de ballon rond au pub du coin de la rue. A chaque but les cris résonnent dans le centre-ville. Les Cambodgiens se sont remis à vivre. Très souvent le sourire aux lèvres.